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  • : Le blog de Benyounès Bellagnech
  • : Analyse institutionnelle : Théorie et pratique au sein des institutions politiques, éducatives et de recherche. L'implication des individus et des groupes dans la vie politique et sociale.
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1 mai 2011 7 01 /05 /mai /2011 10:40

2.1.3.5. Conclure sur le possible

 

La théorie du possible est « une analyse portant sur les tendances et les virtualités, en tenant compte des obstacles, des causes ou des raisons, des décisions qui auraient pu différer ou entrainer autre chose. La situation privilégiée où naissent les possibles ne va jamais sans risques. Le « réel » alors se pénètre de ces virtualités qui tendent à le nier. Celui que le « réel » obsède ne comprend rien. Ainsi opère le travail du négatif. Ce sont les contradictions et conflits au sein du réel qui font surgir par les problèmes posés, les virtualités. Ouvrant le « réel », l’empêchant de se clore et même de se définir, la conjecture l’emporte sur la structure du réel. L’illusion historique qui se place devant le fait accompli ne comprend plus ce qui s’est passé avant l’accomplissement. Il y a donc un moment dialectique : réel « possible-impossible. Ou même, toujours à trois termes : les décisions, les hasards, les déterminismes (qui existent mais sont toujours multiples, et non unilatéralement déterminants) (H. Lefebvre, 1980b, p. 240) ».

 

Méthodiquement le processus s’organise ainsi par :

 

1) l’analyse des tendances : causes, raisons,

2) l’inspection des virtualités : comme autres possibilités qui peuvent modifier les idées premières et changer le sens des stratégies posées.

3) une recherche et un travail du négatif comme : les contradictions et les conflits au sein du réel (décision) ;

4) la production de nouveaux possibles (hasard) : ils surgissent des problèmes posés et des virtualités,

5) le réel : il est constitué par la détermination des choix (stratégie) et la conjecture qui forment le déterminisme et l’emportent dans la production de la structure du réel.

 

Toutefois, rien ne se réalise toujours tel que chacun le pense ou le souhaite. Les limites sont celles que l’homme et la société s’imposent. La bataille entre le nécessaire et la contingence s’effectue dans la décision des possibles. Lorsque le possible est une nécessité, elle devient réelle et se détermine comme un fait obligatoire. Si elle est contingente, elle se transforme en une éventualité, une possibilité non déterminée. La difficulté souvent est de penser qu’une possibilité peut-être éventuelle. Le piège des possibilités existe car toute proposition faite à autrui qui se pose comme possibilité, dès qu’elle est acceptée s’inscrit comme nécessaire.

 

« La contingence est l’arbitraire, la liberté, la création (H. Lefebvre, 1980b, p. 241) ». [...] « Jusqu'à maintenant les possibilités humaines n'ont été distribuées que parcimonieusement, alors que les « masses » - la communauté humaine - les fondent par leur travail. Par un manque d'imagination qui vient d'un manque de raison (dialectique), la plupart des gens (parmi les «masses» elles-mêmes...) ne pensent pas que les choses puissent devenir profondément différentes de ce qu'elles sont. Ils croient facilement que toujours, à la même place, il y aura la même petite boutique - ou une boutique semblable -, la même maison, le même champ (H. Lefebvre, 1947²b, p. 261) ».

 

Pourquoi ne pas changer ? Laisser les « possibilités nécessaires » et s’orienter vers les contingentes. Penser la nécessité avant tout, c’est peut-être sacrifier l’idée nouvelle, le pourquoi pas ! L’éventualité : c’est ce qui est neuf, qui paraît illusoire car inconnu, comment pouvons-nous croire que ce n’est pas nécessaire ? C’est « après-coup » que l’illusion présente se transforme en nécessité réelle. Ainsi, créer un monde sous le slogan : Changeons la vie !, c’est peut-être aller vers les possibilités contingentes. C’est accepter de ne pas se laisser porter par le sens commun dicté par la conjecture de la société. Elle fixe ainsi un mode de vie dans un espace social « tranquille ». Est-ce le moment d’un nouveau bond ? Comment le définir ? Seule la présentation des possibilités peut en permettre une approche. Il faut rêver le monde de demain et lancer l’utopie comme moteur du changement ; et si c’était possible !

 

Pour Henri Lefebvre, s’arrêter à l’explication du présent par le passé n’a pas de sens. C’est dans le possible (39) que se construit l’advenir, dans une perspective globale, stratégique et réfléchie. Il pense le moment (40). « Il faut surtout montrer l’ampleur, la magnificence des possibilités qui s’ouvrent devant l’homme ; et qui sont si réellement possibles, si proches, si rationnellement réalisables (une fois les obstacles politiques brisés) que cette proximité du possible peut passer pour l’un des sens (péniblement et terriblement inconscient) de la fameuse « inquiétude moderne » de l’angoisse devant « l’existence » telle qu’elle est encore (H. Lefebvre, 1947²b, p. 244) ».

 

Comment changer la vie ? En pensant l’homme dans sa globalité comme oeuvre, car « l’oeuvre rassemble ce qui par ailleurs se disperse » (H. Lefebvre, 1980a, p. 204). Ainsi, comme Henri Lefebvre, « je rêve d’un monde où chacun trouverait son identité en cherchant sa différence (H. Lefebvre et C. Regulier, 1978b, p. 192) ». Dans ce monde utopique (Cf., Charles Fourrier), l’oeuvre de l’homme serait lui-même, maître de son éducation tout au long de la vie pour se produire comme possible (41).

 

(39) « Une analyse portant sur les tendances et les virtualités, en tenant compte des obstacles, des causes ou des raisons, des décisions qui auraient pu différer ou entraîner autre chose. La situation privilégiée où naissent les possibles ne va jamais sans risques. Le «réel» alors se pénètre de ces virtualités qui tendent à le nier. Celui que le « réel » obsède ne comprend rien. Ainsi opère le travail du négatif. Ce sont les contradictions et conflits au sein du réel qui font surgir par les problèmes posés, les virtualités. Ouvrant le « réel », l’empêchant de se clore et même de se définir, la conjoncture l’emporte sur la structure réelle. L’illusion historique qui se place devant le fait accompli ne comprend plus ce qui s’est passé avant l’accomplissement. Il y a donc un moment dialectique : réel « possible-impossible ». Ou même, toujours à trois termes : les décisions, les hasards, les déterminismes (qui existent mais sont toujours multiples, et non unilatéralement déterminants) (H. Lefebvre, 1980b, p. 240) ».

 

(40) « Le « moment » est « la tentative visant la réalisation totale d’une possibilité. La possibilité se donne ; elle se découvre ; elle est déterminée et par conséquent limitée et partielle. Vouloir la vivre comme totalité, c’est donc nécessairement l’épuiser en même temps que l’accomplir. Le moment se veut librement total ; il s’épuise en se vivant. Toute réalisation comme totalité implique une action consécutive un acte inaugural. Cet acte simultanément, dégage un sens et le crée (H. Lefebvre, 1962²a, p. 348) ».

 

(41) Cette idée a été développée par R. Hess dans la dernière conférence du séminaire, lors de sa présentation d’Henri Lefebvre et la pensée du possible, théorie des moments et construction de la personne (Paris, Anthropos, 2009). Par l’entrée dans ses moments, la personne se produit, se « construit comme oeuvre » en relation avec ses « communautés de référence ».

 

Sandrine Deulceux

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30 avril 2011 6 30 /04 /avril /2011 09:49

2.1.3.4. La conscience anticipante comme générateur de l’intuition

 

La conscience anticipante conduit l’intuition. Elle est pour Ernst Bloch Principe espérance. L’espoir donne un autre niveau aux possibles. Pour ce philosophe, «penser c’est franchir». C’est « le rêve vers l’avant ».

 

« Une préoccupation majeure de cette partie est la découverte et la prise de conscience du non encore conscient ainsi que de sa spécificité. C'est-à-dire de ce qui est encore relativement inconscient, sur la face tournée de l’autre côté, vers l’avant, et non sur celle située en arrière. Sur la face d’un Nouveau en émergence, qui n’a encore jamais été conscient, et non plus de quelque chose d’oublié et de passé dont il s’agirait simplement de souvenir, c'est-à-dire de quelque chose qui aurait sombré dans le subconscient archaïque (E. Bloch, 1976, p. 19) ».

 

Ernst Bloch explique la conscience anticipante par ce qui nous pousse vers l’avant, le souhait comme le désir de conduire la volonté d’aller vers la réalisation de ce que la conscience nous dicte. C’est une forme de pulsion, son assouvissement devient nécessaire. L’instinct de conservation, conduit l’homme à résoudre son dilemme, ce qui induit l’effet d’anticipation. D’après E. Bloch, cette conscience est anticipante, lors des rêves éveillés. Pour moi penser, c’est rêver, c’est construire des possibles.

 

« Combien de fois ne se trouve-t-on pas devant quelque chose qui peut être ! Ou qui peut être différent de ce qu'il a été jusque-là, raison pour laquelle on peut y changer quelque chose. Or cela serait impossible s'il n'y avait pas du possible dans et devant ce quelque chose. Nous voilà au seuil d'un champ fort vaste, et il s'agit maintenant de l'explorer. Déjà le fait qu'un «pouvoir-être» (ein Kannsein) puisse être énoncé ou pensé ne va nullement de soi. Il y a là quelque chose d'encore ouvert, quelque chose qui peut être signifié différemment, prendre d'autres dimensions, être introduit dans de nouvelles relations, bref qui peut être changé. Là où l'on ne peut plus rien, là où plus rien n'est possible, la vie s'arrête (E. Bloch, 1976, p. 270) ».

 

Il présente les différentes formes de possible : formel, objectif, conforme à la structure de l’objet réel, objectivement réel…

 

Pour Ernst Bloch la réalisation des possibles se traduit par la souffrance de l’être de devoir toujours poursuivre vers l’avant, à la recherche de l’essentiel…

 

Dans mon analyse ainsi menée, j’ai tenté de démontrer le sens que pouvait prendre le possible afin d’expliciter la démarche qui s’exerce alors dans l’expression de la phase progressive. Penser vers l’avant semble utopique au premier abord, car il est difficile de pouvoir réaliser l’ensemble de nos intuitions même si nous pensons que la stratégie et le programme ont bien planté leur décor.

 

Sandrine Deulceux

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29 avril 2011 5 29 /04 /avril /2011 09:25

2.1.3.3. L’intuition comme producteur des possibles

Le terme intuition existe depuis 1542, en latin intuitio de intueri « regarder attentivement ». Ce terme provient de la famille étymologique du verbe « tuer » (36). En latin, on trouve les sens comme « le regard attentif ou la protection ». Ainsi l’intuition permet la connaissance immédiate, elle se base sur l’expérience empirique, plus que sur un raisonnement. C’est comme un sentiment vague, qui semble être une possibilité, mais qui n’existe pas réellement. En se basant sur cet ensemble de fait, l’intuition se découvre comme porteuse de possibles. C’est « celui d'une pensée anticipatrice qui devance les preuves, ou d'une compréhension profonde qui va de l'apparence vers la réalité des choses. [...] c’est entre l'appréhension sensible et l'intellection pure (N. Mouloud, 2004) » (37).

« L'intuition est « anticipatrice », et elle est «pénétrante». Elle nous donne le sens d'une situation avant que les éléments de celle-ci ne soient entièrement explorés ou scrutés. Précisément, la « psychologie de la forme » a mis en valeur cette part de la vue organisatrice, de l'insight, qui permet la résolution des problèmes pratiques ou théoriques. Mais, d'une autre manière, l'intuition va à l'essentiel et fait le passage du phénomène à l'être des choses. On retrouvera cette caractérisation de l'intuition dans de nombreuses doctrines, soit ontologiques, soit phénoménologiques, de la connaissance » (N. Mouloud, 2004).

 

La question qui se pose est en rapport à la relation empiriste de l’intuition. Elle se construit à partir de l’expérience. Elle se pense dans l'expérience et dans son rapport au monde car « l’expérience sensible signale ou annonce l'idée, dont la noèsis (38) prend possession, et dont la déduction développe les implications (N. Mouloud, 2004) ».

 

Cependant, en prenant en compte l’homme dans la société, l’homme s’induit des forces de la société dans laquelle il évolue. Et le risque provient de l’aliénation qui « a dépouillé la vie de tout ce qui autrefois, dans sa faiblesse primitive, lui conférait joie et sagesse. La science, la puissance ont été acquises, mais au prix de quels sacrifices ? (de telle sorte que l'idée même du sacrifice de l'homme a été « essentielle » au cours du progrès de l'homme !). L'humain, dépouillé et projeté hors de lui-même, a été et reste livré à des forces qui cependant viennent de lui et ne sont que lui-même - déchiré et opposé à lui-même (H. Lefebvre, 1947²b, 264) ». Ce qui pose les limites de l’intuition en tant que facteur de production des possibles, car la pensée humaine aliénée fait souvent l’erreur de croire en son intuition aliénée, elle aussi.

 

Ces forces conductrices sont de tout ordre, la société traditionnelle est divisée en différents systèmes adaptés à la vie de l’homme et à son combat contre la nature. Toutefois, le danger de l’aliénation est présent dans chaque système de la société : « économique (division du travail ; propriété « privée » ; formation des fétiches économiques : argent, marchandise, capital) ; sociale (formation des classes) ; politique (formation de l'État) ; idéologique (religions, métaphysiques, morales). Elle a été également philosophique : l'homme primitif, simple, au niveau de la nature, s'est scindé en sujet et objet, forme et contenu, nature et pouvoir, réalité et possibilité, vérité et illusion, communauté et individualité, corps et conscience (« âme », « esprit »). À travers ses illusions idéologiques, la philosophie a exprimé confusément cette situation de l'homme : déchirement et dépassement, processus dialectique, subjectivité et objectivité progressivement conquises. La philosophie et son vocabulaire spéculatif (métaphysique) ont fait partie de l'aliénation humaine (H. Lefebvre, 1947²b, p. 264) ».

 

Si l’intuition n’est pas pure. L’intuition reste productive de possible. Cependant, c’est dans son altération, qu’il est utile de prendre en compte l’aliénation. « L’homme ne s'est développé qu'à travers l'aliénation ; l’histoire de la vérité ne se sépare pas de l'histoire des erreurs. De telle sorte que la philosophie, dans la mesure où elle se sépare de la métaphysique extérieure à l'humain, ne peut être condamnée en bloc, mais se « dépasse » et devient aujourd'hui si dénonciatrice de l'aliénation, l'accusatrice de l'inhumain (H. Lefebvre, 1947²b, p. 265)».

 

Ainsi, l’homme s’aliène, son intuition est compromise, elle est édictée inconsciemment par la conscience collective. Le possible est donc aliéné aussi. Pourtant, le possible garde sa réalité, car c’est une utopie que de penser que l’intuition peut-être pure. « Voilà bien longtemps que la pensée vers l'avant est annoncée et demande à être entendue. Mais les lâches trouvent toujours une échappatoire et les menteurs restent dans les généralités. Ils se retranchent derrière leurs belles phrases redondantes ou tortueuses et vous échappent alors même qu'ils sont pris sur le fait (Ernst Bloch, 1976, p. 300) ».

 

L’intuition émerge de la conscience de l’homme. On peut exprimer cette conscience humaine par une forme intrinsèque, qui serait la conscience privée et une conscience extrinsèque dépendante du collectif. L’une et l’autre s’influencent continuellement et conduisent à modifier le sens de l’intuition de l’homme. Ernest Bloch a inspiré Henri Lefebvre par ses écrits et le livre en trois tomes du Principe espérance.

 

(36) Le verbe est issu du latin tutare ou tutari « vieller sur, garder, défendre, se protéger contre ».

 

(37)

http://www.universalis.fr/corpus2- encyclopedie/117/12171/K100191/encyclopedie/INTUITION.htm#03010000

 

(consulté le 02/05/2009)

 

(38) En philosophie, La noèse ou noésis en grec exprime l’acte de la pensée en phénoménologie.

 

Sandrine Deulceux

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28 avril 2011 4 28 /04 /avril /2011 19:45

2.1.3.2. Un possible en devenir

 

« Philosophiquement, le devenir reste énigmatique. Et le temps ? - Dieu ? Devant Dieu ? Hors Dieu ? Le divin lui-même ? Les théologiens hésitèrent. Et pourquoi l'apparition et la disparition (de ceci ou de cela) ? Pourquoi la naissance, la croissance, la dégradation, le vieillissement, la mort ? Qu'en ont dit les philosophes, depuis Héraclite ? La plupart ont éludé la question du Temps au profit de l'immuable - sainte - éternelle Vérité, de l'Être, du Réel défini et définitif (H. Lefebvre, 1986a, p 40) ».

 

Bien que le devenir reste une énigme, un ensemble de questions ne se pose plus réellement. L’ère de la modernité a créé l’entendement et la raison a évolué vers un objectivisme. Les perspectives restent illusoires car les modèles d’hier ne préviennent en rien ceux de demain. L’imagination bien que fertile reste limitée.

 

« Le possible a parfois stimulé l'imagination des écrivains. Ils ont rêvé ; ils ont «anticipé ». Et qu'ont-ils imaginé ? Des palais fabuleux, des édifices, des cités de plaisirs, des randonnées cosmiques. Combien ont cherché à se représenter ce que deviendrait la vie quotidienne, si elle se trouvait peu à peu haussée au niveau de ce que permettent la technique moderne et la science ? Si la richesse et la puissance ne se trouvaient plus hors de la communauté ? Si les excroissances monstrueuses, l'art pour l'art, la pensée pour la pensée, la puissance pour la puissance sur les hommes disparaissaient ? (H. Lefebvre, 1947²b, p. 261) ».

 

Les perspectives se définissent selon une stratégie pour le devenir de l’homme dans un avenir proche ou lointain et la relation entre tous ces éléments détermine son processus. Chaque notion, afin de spécifier celle du possible au plus juste, demande d’aller vers la saisie du concret, de connaître les drames et les indications exprimant les actes tels qu’ils se sont réalisés par le passé. « La démarche intellectuelle liée à ces opérations, qui les codifie, ou qui les appuie méthodiquement, a été nommée : transduction (H. Lefebvre, 1968²a, p. 130) » (33). C’est le passé qui oriente le présent et qui permet à la pensée d’imaginer le futur.

 

Henri Lefebvre développe sa théorie en dénonçant le sens contradictoire du devenir. Dans un contexte relativisme, il présente le devenir comme un moment de transition illimité. Puis dans un contexte de périodisation le devenir devient provisoire et réversible. Qu’est-ce que le devenir ? Il ne se visualise que dans le renversement de l’histoire. Le présent se modifie lentement, et le devenir passe pour inaperçu. C’est dans le passé, que nous nous apercevons du bond, du changement, il prend de l’épaisseur. Le devenir se construit dans et par le passé.

 

Le continuum du concept de devenir se définit selon Hegel et Marx dans une différence de posture. L’un le définit comme une fin : achèvement (Hegel), et l’autre, par le mouvement : maturation (Marx). Hegel considère que tout devenir aura une fin et Marx que l’homme se produit chaque fois dans une suite de moment infini. Pourtant ces deux philosophes se rejoignent dans le sens où le devenir est un processus d’accomplissement, une étape constructive vers un autre avenir (34).

 

« Les possibilités relèvent d'un double examen : scientifique (projet et projection, variantes des projets, prévisions) et imaginaire (à la limite : la science-fiction). Pourquoi l'imaginaire entraînerait-il seulement hors du réel au lieu de féconder la réalité ? Lorsqu'il y a perte de la pensée dans et par l'imaginaire, c'est que cet imaginaire est manipulé. L'imaginaire est aussi un fait social. Les spécialistes ne réclament-ils pas l'intervention de l'imagination et de l'imaginaire lorsqu'ils acclament « l'homme de synthèse », quand ils sont disposés à recevoir le « nexialiste » (35) ou le « généraliste ? (H. Lefebvre, 1968²a, p. 132) ».

 

L’imagination qui semble être l’un des moyens de créer le possible dépend aussi de la conscience de l’humain et de son intuition propre. L’ensemble des phénomènes qui produisent le possible dépendent de l’intensité et du pouvoir de l’imagination des uns sur les autres. Le possible s’inverse alors, sort de sa virtualité pour devenir réalité.

 

(33) La démarche transductive est explicitée dans le chapitre nommé la place de la pensée transductive chapitre 2.2.

 

(34) J’ai ajouté le terme autre à avenir, car l’avenir, c’est demain. Pourtant, rien ne précise dans ce terme que l’avenir sera différent. L’idée de devenir offre la possibilité de transformation de l’avenir.

 

(35) « Le nexialisme ? C’est l’expression d’un totalisme appliqué […] l’intégration de plusieurs sciences ; […] tel était exactement le but du nexialisme. […] À l’Institut nexialiste, on enseigne que derrière les éléments généraux de chaque science, il existe un lien inextricable entre cette science et toutes les autres. (Van Vogt, La faune de l’espace, pp. 55,57 et 66) ».

http://revel.unice.fr/cycnos/document.html?id=544 (consulté le 02/05/2009).

 

Sandrine Deulceux

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27 avril 2011 3 27 /04 /avril /2011 11:01

2.1.3.1. Du possible à la réalité

 

Dans son livre Critique de la vie quotidienne, Henri Lefebvre exprime son doute quant à la volonté de chacun d’aller vers le possible.

« La vie quotidienne serait-elle à jamais immuable sous le soleil qui éclaire un monde toujours nouveau, immuable dans l’ennui, la grisaille, la répétition des mêmes gestes?

Beaucoup le croient, parmi ceux qui désespèrent de l’humain et s’attendrissent hypocritement sur ces «gestes éternels» des paysans, des mères, des ménagères…

La vie quotidienne n’est pas immuable ; elle peut déchoir, donc elle change. Et même les seuls vrais changements humains profonds sont ceux qui mondent sur cette substance et s’y inscrivent (H. Lefebvre, 1947²b, p. 243) ».

 

Il faut penser cet extrait aussi en rapport à l’époque à laquelle il fut écrit. Soit en 1945. Lorsqu’Henri Lefebvre termine son dernier chapitre, c’est la fin de la guerre et la découverte aussi pour certains de l’absurde. Comment faire pour ne plus penser le possible alors que cela fait partie de la nature humaine que de se construire par les projets et le progrès. Les causes de déchéance humaine sont produites au départ par une déchéance de la vie quotidienne, tel l’exprime l’auteur. Il explicite alors que le risque provient tant du fascisme au départ, mais que le progrès aussi peut en être l’instigateur. Donc, il s’interroge, après avoir présenté l’absurde, sur comment formuler au mieux le possible.

 

Le possible est dialectique, il peut être réel ou rester virtuel. Le terme possible est à la fois dans la réalité, ainsi que dans la virtualité. Le possible (30) prend son sens dans ce qui peut exister, ce qui est concevable, envisageable, réalisable, ce qui est admissible ou facile… Le terme possible prend le sens de permission, ce qui est autorisé, de ce qui est croyable. Il donne des limites entre un maximum et un minimum envisageables. Il exprime ce qui peut être réalisé, être vrai de ce qui ne l’est pas. Dans ce cas le possible prend le sens de contingent ou d’éventuel. C’est aussi la base du potentiel et du virtuel, de l’acceptable et du convenable, de l’imprévisible et du déroutant. Pour H. Lefebvre, il représente ce qui est réalisable, ce qui est conçu comme non contradictoire avec le réel ou le présent. Selon Henri Bergson : « Le possible est donc le mirage du présent dans le passé (H. Bergson, 1985) (31) ».

 

La réalité (32) est un terme issu du latin reellité ou réalitas. En 1550, il correspond au contrat rendu réel. Dans le langage courant, il se définit comme tout ce qui existe, qui n’est ni invention, illusion ou apparence. C’est une vérité. Suivant les domaines dans lequel ce terme est utilisé, son sens se transforme. En philosophie, il est réalisme, spiritualisme, et matérialisme. Ces formes de réalité sont l’expression de ce qui est réel dans le sens d’un fait, donc une connaissance. Le sens juridique de ce terme détermine le caractère de ce qui est réel. Dans la logique des faits, le jugement de réalité s’oppose au jugement de valeur. C’est aussi en relation avec la vie, l’existence réelle en opposition aux désirs, aux illusions, aux rêves. Tout ce qui se crée par l’imagination et les représentations s’explique par la réalité virtuelle. Selon Henri Lefebvre « le possible s’oppose au réel et fait partie intégrante du réel : de son mouvement. Si le possible se découvre aujourd’hui comme un horizon indéterminé et sans limites, c’est que porte en lui des contradictions radicales (H. Lefebvre, 1971b, p. 48) ».

 

La virtualité prend un sens différent en anglais, il s’apparente aux « faits ou qualités essentiels ». [...] Si nous prenons en compte cette signification dans notre «virtualisation » de situations riches en émotions, nous n’entendons pas par là qu’on doit toujours savoir de façon certaine et objective quels « faits ou qualités » s’avèrent « essentiels » dans une situation donnée. Mais nous partons en revanche de l’hypothèse qu’il est peut-être utile de traiter les émotions spontanées, suppositions, projections et idées qui orientent souvent notre comportement conscient non pas comme des possibilités mais bien plutôt comme des réalités, en partant du principe que ces réalités-là sont elles-mêmes des produits culturels qui ont leurs propres histoires et racines et sont à l’origine même de « qualité et faits » essentiels et cachés. Dans cette mesure, les deux sens du mot virtuel, lequel désigne donc à la fois ce qui est «possible mais non réel» et ce qui « concerne la partie essentielle d’une expérience », ne s’esculent pas mais s’ajoutent de façon complémentaire (B. Müller et J. Moll, 2009, pp. 207-208) ».

 

Ainsi dans ce qui est possible, la notion d’essentiel redonne sens à la réalité et à la virtualité, c’est par l’engagement que l’acte se réalisera. Pour Henri Lefebvre, le possible se présente par la production de son avenir. C'est-à-dire, l’homme est né pour être actif. Tout commence par la prévision d’une part, puis l’action ensuite qui réalise un changement possible, comme une révolution de la société. C’est une rupture, pour se diriger vers une conception du monde où existe la liberté de pensée, d’agir, pour faire son oeuvre. Il exprime le possible selon plusieurs niveaux de réalité :

- Le possible-possible : c’est tout un programme, c’est ce qui est réel, quotidien, le normal, sans surprise…

- Le possible-impossible : « Le nouveau romantisme (révolutionnaire) affirme le primat du possible-impossible et saisit cette virtualité comme essentielle au présent. Il estime ainsi franchir l’abîme entre le vécu partiel et le présent total. Il se propose de donner une signification nouvelle à ce mot si vague et dont on a tant abusé : le moderne (H. Lefebvre, 1971b, p. 50) ».

 

L’imagination est l’élément générateur du possible. Celui qui s’inscrit dans l’idée de réaliser ce qu’il imagine est déjà producteur de possibles. Les règles, les lois et la morale ont tendance à freiner notre imagination, à faire croire à chaque individu que l’instituant n’existe pas. Pourtant, rien n’est défini comme une fin. Le monde continue d’évoluer avec l’homme, vers un avenir où, enfin, la liberté existera comme vérité.

 

(30) Le terme possible existe à partir du XIIIe siècle, du latin possibilis, de la famille de pouvoir. En latin pouvoir devient potere, posse dans le sens « d’être capable de et avoir du pouvoir ». Le sens se transforme lorsque le sens de posse se croise avec celui de potis « être puissant ou être capable » ou de posse et potere «diriger » ou de posse et pertere «demander ». L’un des glissements des sens, a donné le possible, l’impossible le potentiel qui donne un sens virtuel « en puissance ».

 

(31) Cette citation est reprise du dictionnaire le Robert (2007). Elle provient du livre d’Henri Bergson, « Le possible et le réel » dans La pensée et le mouvant, Paris, Presse Universitaire de France, 1934, éd. 1985. La suite indique alors le mouvement entre le présent et le futur « Le possible est donc le mirage du présent dans le passé ; et comme nous savons que l'avenir finira par être du présent, comme l'effet de mirage continue sans relâche à se produire, nous nous disons que dans notre présent actuel, qui sera le passé de demain, l'image de demain est déjà contenue, quoique nous n'arrivions pas à la saisir. ».

 

(32) Le terme de réalité provient de la famille étymologique de l’adverbe « rien », issu du latin rem, res, rei qui exprime l’idée de « chose, être, affaire, fait ». La famille de res comprend réel, d’un terme juridique «relatif aux choses et aux biens ». Il peut prendre le sens de « publier », réalité, réifier et république et de «venger» comme la revendication.

 

Sandrine Deulceux

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26 avril 2011 2 26 /04 /avril /2011 15:47

2.1.3. La phase progressive

 

La phase progressive débute dans le passé, les éléments contradictoires en sont les ferments. Elle tend à rejoindre l’avenir en progressant de moment en moment. L’étape initiale se situe dès le commencement du moment. C’est l’instant qui s’exprime comme une fin et conduit au début d’une nouvelle étape. En découvrant ce point critique, le sens de l’analyse se renverse et se projette vers le futur. Henri Lefebvre compare le sens du devenir au flux héraclitéen, « une structure intelligible et pratique à la fois, réelle et normative à la fois, sans le tronçonner par des discontinuités absolues. La totalité se déterminerait comme la totalité des moments (Henri Lefebvre, 19594, p. 227) ».

 

L’émergence de chaque situation s’exprime par le processus d’émancipation de l’homme, et la progression comme une réponse aux besoins exprimés. Lorsque l’analyse atteint à nouveau le présent, tout ce qui était connu est posé. Il s’agit maintenant de progresser dans le futur en posant des stratégies à partir de la compréhension des agissements de l’individu et de la société. Ainsi, les possibles deviennent réalité en les inscrivant dans un programme à suivre pour entrer dans la voie nouvelle.

 

L’idée est la première étape à la réalisation d’un futur, elle provient du rêve, et répond à un besoin qui se définit par les désirs de l’homme. Le passage entre l’idée et sa réalisation s’élabore dans un premier temps selon une utopie, puis se pose en possible. D’après Henri Lefebvre, c’est dans l’impossible que se crée le possible. L’impossible est la contradiction première qui de son dépassement permet l’émergence du possible.

 

Henri Lefebvre développe sa théorie en dénonçant le sens contradictoire du « devenir ». Dans un contexte relativiste, il présente le « devenir » comme un moment de « transition illimité ». Puis, dans un contexte de périodisation, le devenir devient « provisoire et réversible ». Il se visualise par le renversement de l’histoire. Le présent se modifie lentement, et le devenir passe inaperçu. Ainsi, c’est par la lecture ou la relecture du passé, que nous percevons le bond, le changement. L’histoire prend alors du sens, de « l’épaisseur ». Ainsi, la découverte des limites, des frontières de chaque période analysée et leur progression révèlent le mouvement.

 

La difficulté de l’analyse est de percevoir comment sera l’avenir. Le chercheur entreprend de déterminer les possibles et les actes à réaliser dans la phase progressive. Il doit être à la fois un créateur, visualiser les idées, et les confirmer par une stratégie élaborée lors de l’observation faite du passé. Il doit donner naissance à l’illusion, la faire entrer dans la réalité pour créer le possible.

 

Sandrine Deulceux

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25 avril 2011 1 25 /04 /avril /2011 09:45

2.1.2. Un point sur la phase régressive

 

La phase régressive ainsi décrite précédemment donne sens aux éléments révélateurs de changement. Maintenant, la question qui se pose aussi est d’en connaître la raison. Ce chapitre est donc un intermède entre ces deux phases : régressive et progressive. L’une d’elles présente le vécu, et l’autre s’oriente vers l’avenir. Ainsi, cette relecture du passé permet de percevoir le mouvement historique donnant lieu à une avancée de la société par des changements tant d’ordre technique, que moral ou encore éthique. C’est à partir des contradictions et de la volonté des membres d’une société que ces changements s’installent. Il faut qu’il y ait au départ un critère qualitatif : la contradiction d’une part. Et d’autre part qu’il y ait aussi un critère quantitatif (le nombre de personnes se rassemblant autour d’une même idée) pour que le changement se produise.

 

En me basant sur les écrits d’Henri Lefebvre et de Karl Marx, les facteurs qui produisent l’action sont propres à l’homme lui même qui se met en action pour produire une réponse à ses propres besoins. Donc, il me semble intéressant ici d’en faire une approche afin de comprendre le sens de ce mouvement historique présentant les projets d’émancipation individuel ou de la société.

 

Bien qu’il faille ne pas mettre sur le même rang l’homme et l’animal - l’homme étant un animal qui raisonne - celui-ci évolue en produisant ce qui lui sera utile pour répondre à ses besoins. D’après Henri Lefebvre, «l’homme (l’être humain est d’abord être de besoin. Il «est» ainsi, beaucoup plus que les animaux, qui presque tous trouvent dès leur naissance, dans leurs corps et leur environnement, les ressources qui permettent leur survie. (H. Lefebvre, 1966b, p. 31) ». À ce propos Henri Lefebvre définit les besoins comme des éléments qui « entrent dans le mouvement général de l’espèce humaine, et pour autant qu’ils stimulent les activités de l’homme qui devient humain (H. Lefebvre, 1966b, pp. 32-33) ».

 

Il évoque aussi le besoin comme un irrationnel apparent. Que signifie ce syntagme ? L’homme est un «être de besoin, un ensemble de besoin. [...] Le besoin, ou tel besoin, s’adresse à des objets ou à d’autres sujets, d’autres êtres de besoin (H. Lefebvre, 1971b, p. 95) ». Le besoin se développe chez l’homme dès qu’il ressent un certain manque. Dans le livre La sociologie de Marx, Henri Lefebvre décrit ces besoins comme : individuels, sociaux, politiques, immédiats, cultivés, naturels factices, réels et aliénés. Il ajoute aussi que «la rationalité dans le social et l’individuel, n’apparaît qu’avec le développement des besoins et lorsque les hommes associés ont besoins de raison agissante (H. Lefebvre, 1966b, p. 32) ».

 

Ainsi, cette raison agissante évoquée précédemment, me semble liée au degré de motivation exprimé par Abraham Maslow et représenté par la pyramide des besoins (28). Cette pyramide présente cinq types de besoins différents :

 

Accomplissement personnel (morale, créativité, résolution des problèmes...) 

Estime (confiance, respect des autres et par les autres, estime personnelle) 

Besoins d'appartenance et affectif (amour, amitié, intimité, famille) 

Besoins de sécurité (du corps, de l'emploi, de la santé, de la propriété...) 

Besoins physiologiques (manger, boire, dormir, respirer) 

 

 

L’importance du besoin conditionne l’intensité de la motivation, il permet de se mobiliser dans l’acte à produire et d’entrer dans le mouvement de l’histoire. C’est dans une tentative de découvrir le sens de la satisfaction que la mobilisation intervient comme facteur du mouvement. Denis Jeffrey ajoute dans son livre Éloge des rituels : « Le besoin crée dans le corps une tension qui cherche son expression pour trouver une détente. Les besoins [...] lorsqu’ils ne sont pas satisfaits maintiennent une tension qui, en s’intensifiant, se transforme en souffrance. Un besoin en souffrance est un besoin en manque d’un objet de satisfaction (D. Jeffrey, 2003, p. 71-72) ».

 

Le désir et la satisfaction sont deux sentiments dépendant l’un de l’autre. Chacun oriente sa vie selon ses souhaits. Cette volonté de progresser est souvent une réponse au désir de réussir, de se dépasser. Le désir agit sur l’être humain, commande au besoin. Ce besoin conditionne sa volonté et permet d’y répondre. L’intérêt dépend de la valeur du besoin, il sera régulateur de la volonté et de l’implication. D’après Henri Lefebvre « le désir veut et se veut. Il devient désir de ceci et de cela sans pour autant cesser d’« être » désir : désir de désirer, désir d’être désiré. Il se change en besoin d’un objet, en proie à cet objet, obstacle, distance, résistance (H. Lefebvre, 1970²c, p. 24) ». Il me semble donc utile d’évoquer que le désir « d’être ou d’avoir » va provoquer ce processus de changement d’ordre individuel ou social suivant l’aspect et le nombre de personnes se ralliant à ce même besoin.

 

C’est aussi dans le domaine de la psychanalyse, que le concept de désir est défini par ses signes de satisfaction. C’est une forme de compromis. Selon Lacan, « le désir naît de l’écart entre le besoin et la demande ; il est irréductible au besoin, car il n’est pas dans son principe de relation à un objet réel, indépendant du sujet, mais au fantasme ; il est irréductible à la demande, en tant qu’il cherche à s’imposer sans tenir compte du langage et de l’inconscient de l’autre, et exige d’être reconnu absolument par lui (J. Laplanche et J-B. Pontalis, 1967, p. 120) ».

 

Pourtant la limite est expliquée par Henri Lefebvre car le fossé se creuse, et le désir se transforme en une banalité. Il nous montre la contradiction, dans la forme du travail et dans les conséquences. « Le travailleur aurait le désir d'un travail parcellaire et abrutissant, le désir d'être exploité en même temps que dominé. Les philosophes confondent allégrement les causes et les effets, ils savent mal analyser les effets. Je veux seulement parler de la volonté de puissance décelée par Nietzsche (H. Lefebvre, 1978b, p. 184) ». Le danger actuel de cette forme de désir est sa relation avec la recherche d’une satisfaction immédiate. Ce qui entraîne par la passion des gestes souvent irrationnels et brusques. La réponse au désir se prolonge dans le besoin, il se traduit par une détermination pour sa réalisation.

 

Mais cet aparté sur le besoin reprend du sens dans ce que Lucette Colin écrit : « Le désir de savoir au sens strict et où la connaissance était alors accessible directement, sans énigme, ni double sens. Ce paradis perdu est peut-être d’ailleurs une construction de l’après-coup issue de la souffrance du doute. Autrement dit, l'investigation comme mouvement vers l'objet est donc présente dès le début de la vie mais pour exister comme mouvement de désir, c’est-à-dire être investi en tant que tel, il faut que s'instaure le manque de l'objet, la conscience du manque (L. Colin, 2007, p. 7) »29. C’est mettre des mots, des faits et une historicité là où elle n’existe pas encore. Le désir donne l’impulsion au possible.

 

Dans la pyramide de Maslow se trouve à son sommet : Accomplissement personnel (morale, créativité, résolution des problèmes...). Ce besoin émerge lorsque tous les autres besoins sont comblés. A ce moment là, il est temps pour l’homme d’entrer dans le mouvement pour se produire comme oeuvre dans une éducation tout au long de la vie. L’objectif de l’homme est de s’émanciper, de tendre vers la liberté en se garantissant l’autonomie de ses agissements et de ses réflexions. Quant à Marx, il précise que l’évolution de l’homme est une lutte contre la nature et que lorsque celui-ci aura développé les sources de production de la nature, la contradiction de l’homme et de la nature auront disparu.

 

(28) L'article où Abraham Maslow expose sa théorie de la motivation, A Theory of Human Motivation, est paru en 1943.

 

(29) Cours de Lucette Colin « Séquence 4 du rapport au savoir avant la période d'investigation sexuelle infantile à la spécificité du désir de savoir », in cours L3 le désir de savoir et ses aléas, 2007.

 

Sandrine Deulceux

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24 avril 2011 7 24 /04 /avril /2011 10:14

2.1.1.5. De l’après-coup au résidu : analyser et comprendre

 

C’est dans l’historicité que se comprend l’après-coup, (nachträglich), le sens réel de l’histoire. Elle est dialectique et ne se contente pas seulement de l’énoncé des faits ; elle prend en compte les résidus. Seulement les résidus n’apparaissent qu’après constitution du système et de son existence propre, car « la complexité est telle que le sens d’un évènement n’apparaît que très lentement et très tardivement. Aujourd’hui seulement, et je découvre le sens de certains petits faits de mon enfance, ou encore de certains événements de l’époque stalinienne (H. Le Lefebvre, 1975a, p. 16) ». Cette théorie de l’après-coup provient du champ de la psychanalyse, pourtant elle s’impose dans la lecture du passé et devient une « théorie outil », donnant sens à l’insignifiant (les résidus). Notamment, un évènement devient lisible, lorsqu’il est élaboré psychiquement, et fait sens dans un contexte significatif. Autrement dit, si je reprends la méthode régressive progressive, elle permet d’élaborer le vécu, à partir des mots, des représentations, et des signifiants déjà connus par chacun. Cette méthode est une relecture des événements, des expériences, du vécu, dont le point de départ est le fait résiduel. Celui-ci prend un sens nouveau dans l’historicité et s’ouvre vers un nouvel horizon de mots (26). Ainsi, «c’est un passé qui n’en finit pas de s’écrire » (27). Toutefois, une phrase ne peut prendre sens, que lorsqu’elle peut s’achever. Dans cette perspective, seule l’historicité permet d’écrire des fins aux « histoires ». Elle affirme un moment de vérité, un fait, et devient indiscutable. Elle redonne sens à la pensée. La théorie des résidus exprimée par Henri Lefebvre, détermine le particulier comme chaînon manquant utile dans l’analyse de l’objet. La question qui se pose alors, concerne à la fois le système mis en place et l’élément n’entrant dans aucune catégorie, et c’est donc, le signe d’une contradiction existante. En effet, dans le livre Métaphilosophie, H. Lefebvre explique le résidu comme élément irréductible, qui se dégage d’une «puissance » (système), comme la religion, la philosophie, le politique…

 

Ainsi, « chaque activité qui s’autonomise tend à se constituer en système, en «monde ». De ce fait celui-ci constitue, expulse, désigne un « résidu ». [...] Du même coup, nous montrerons ce que chaque élément résiduel (du point de vue de la puissance constituée en monde) contient de précieux et d’essentiel. Nous terminerons par la décision fondatrice d’une action, d’une stratégie : le rassemblement des résidus, leur coalition pour créer poétiquement dans la praxis, un univers plus réel et plus vrai (plus universel) que les mondes des puissances spécialisées (H. Lefebvre, 1965²b, p. 31) ».

 

Le concept de résidu est, pour ma part, un révélateur car en tant que signe, il permet de mettre en lumière cette contradiction comme facteur de crise. En ce qui concerne, ma recherche, je placerai comme résidu, l’autodidacte qui, par exemple se forme seul en dehors du système de l’éducation. L’autodidacte démontre la possibilité d’apprendre sans structure formelle, et dans la perspective d’un apprentissage tout au long de sa vie. Cette figure de l’apprenant prend du sens dans la construction de l’Homme total.

 

(26) L’horizon des mots vu par Gabriel Weigand est «l’ouverture à l’exploration des mots de l’autre [...] comme une enquête en arrières plans qui jouent sur les situations vécues (R. Hess et G. Weigand, 2007, p. 114)». Pour ma part, je pense que l’ouverture offerte par l’entrée dans un possible permet d’éclairer la situation et redonner du sens.

 

(27) Lucette Colin Séminaire sur la théorie de l’après-coup, présenté en juin 2009. http://education-vie.univ-paris8.fr/docs/spip.php?article58.

 

Sandrine Deulceux

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23 avril 2011 6 23 /04 /avril /2011 10:31

2.1.1.4. Les bonds et le dépassement

 

L’homme tend vers son dépassement, il entre dans un mouvement perpétuel le conduisant vers un souhait de répondre à ses besoins. Ce bond et le dépassement qu’il engendre, on pourrait l’assimiler à l’effet pygmalion (23), dans la volonté de l’homme d’aller vers la réalisation de ses intérêts. Le repère de l’origine d’un bond est à la fois la représentation d’une fin et d’un début. Bien qu’à première vue, sa découverte semble simple. La difficulté est de le saisir dans sa réalité. Pour ma part, j’explique ce bond par les tournants de vie. Dans l’autobiographie qui va suivre, il se positionne selon mes changements de posture dans mes projets de formation principalement. La nécessité qui l’engendre est toujours cette recherche d’une qualité indispensable à mon équilibre : l’indépendance. Cette volonté de l’atteindre semble s’endormir pendant la réalisation d’un moment, puis la contradiction s’installe à nouveau démontrant que cette situation actuelle est non conforme, à mes souhaits. Bien qu’il semble y avoir une période stagnante, la contradiction s’impose et engendre le mouvement et le besoin de dépasser cette situation : j’entre alors dans un nouveau moment.

 

D’après Henri Lefebvre, le bond est qualitatif, mais il se mesure quantitativement. Il se repère dans la discontinuité, car « lorsqu’une qualité est arrivée à sa limite immanente, pressée pour ainsi dire par le changement quantitatif. Pour comprendre ou prévoir le bond qualitatif il faut étudier le changement quantitatif et déterminer le point ou la ligne « nodale », où surgit la discontinuité (H. Lefebvre, 19407, p. 36) ».

 

La formation est le moyen de passer dans de nouveaux moments, certains s’épuisent totalement, et d’autres entrent en période de latence. Le savoir permet de penser l’avenir. Il construit l’idée, et le possible. Si l’on se réfère à l’apprentissage et l’acquisition de la connaissance, il faut comprendre ce processus dans le sens d’une spirale. Il provient de l’apport des savoirs qui est extérieur à soi et par retour sur soi, il devient sien, il s’acquiert ; la finalité est de l’approfondir en soi et de le transformer en connaissance : le bond se fait. La théorie des bonds s’explique par l’effet de dépassement : Henri Lefebvre l’explique comme : « mouvement de la pensée et de la société » : « le retour au-dessus du dépassé pour le dominer et l’approfondir, et l’élever de niveau en le délivrant de ses limites (de son unilatéralité) (H. Lefebvre, 1947a, p. 223) ».

 

Lors de ma rencontre avec l’oeuvre d’Henri Lefebvre, j’ai saisi dans le concept de l’Homme total le moyen de répondre à cette volonté que nous avons tous d’entrer dans un mouvement perpétuel pour changer la vie. Ainsi l’une des natures de l’homme est de se dépasser continuellement pour répondre à son attente d’une forme de vie idéale. La question qui se pose est de savoir si toute contradiction peut disparaître ? Et ainsi apporter le sens de l’harmonie chez chaque individu, pour la société et le monde. C’est là ce possible tant recherché, créateur de la fin de l’histoire (24). Ce possible de l’ordre de l’utopie préconise l’homme comme inachevé (25), il s’émancipe en dépassant chaque situation qui l’entraine vers un devenir meilleur. Ce processus s’explique par sa libération des moments négatifs et l’amène à découvrir d’autres moments, qui à leur tour produiront de nouvelles contradictions…

 

Il faut comprendre le changement comme une différence entre ce qui était et ce qui est ou ce qui sera. Il faut voir la différence comme dialectique dans le sens prévu par Hegel, c'est-à-dire le changement bien qu’il soit évident reproduit un processus identique dans la réalisation de ce dépassement. Si l’on compare l’évolution de la vie des hommes, il faut placer celle-ci dans une ascension de la forme d’une spirale, car l’homme ne souhaite pas reproduire les erreurs du passé, il construit l’avenir en s’appuyant sur son histoire et son expérience. Comme peut le signifier Héraclite, l’eau du fleuve s’écoule toujours dans le même lit, pourtant ce n’est plus la même eau.

 

(23) « Pygmalion était un roi légendaire de la mythologie grecque. Il était roi de Chypre. Sculpteur à ses heures, il tailla dans la pierre la statue d’une femme superbe et finit par en tomber amoureux. Il demanda donc à Aphrodite (la déesse de la beauté et de l’amour) de donner vie à la statue, ce qu’elle fit. Ensuite, il épousa sa propre sculpture devenue femme ».

http://www.reunion.iufm.fr/Dep/listeDep/exposes/effet%20pygmalion.pdf (consulté le 09/04/2010 à 10 h 01).

 

(24) Sachant que l’homme produit son histoire en se réalisant par son oeuvre, il intéressant de connaître le sens de cette fin de l’histoire, comme aboutissement de l’homme vers sa totalité.

 

(25) Pour George Lapassade, l’homme est un Être « à la fois biologiquement, psychologiquement et historiquement inachevé et inachevable (G. Lapassade, 1963, réed. 1997, Quatrième de couverture) ».

 

Sandrine Deulceux

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22 avril 2011 5 22 /04 /avril /2011 16:16

2.1.1.3. Le concept de rupture

 

Plusieurs questions me viennent à l’esprit, elles organisent ma réflexion et sont constitutives du cheminement de ce travail d’analyse. Qu’est-ce que la rupture ? Quelle place prend t-elle dans la méthode régressive progressive ? À quel moment apparaît-elle ? Quelles en sont les raisons ?... Afin de donner un sens à cette recherche, il me semble important de traiter plusieurs points au préalable afin de saisir, le processus de changement, tant chez l’homme que dans la société. Il apparaît que dans toute mutation, la crise et le conflit en sont les causes. Ainsi, j’aborderai pour expliquer mon raisonnement, l’aspect transition homme/société, et les processus de mutation qui semblent définir les points de rupture des moments historiques.

 

La rupture démontre la force de l’identification agissante pour transformer l’identité tant individuelle que sociétale. Dans ce cas, la rupture s’exprime par une interruption dans le continuum des modes de vie. Cette discontinuité devient alors remarquable. Elle rompt le quotidien. Par exemple, Henri Lefebvre recherche les points critiques ou crises, qui déterminent les fins et les débuts de chaque nouvelle période ou époque. Toutefois cette rupture institue aussi la fin d’un mythe personnel comme tournant de vie. Petites ou grandes ces ruptures s’expriment alors sous forme de révolutions plus ou moins spectaculaires. De l’historicité émerge le monde en action. Son observation fait prendre conscience de la différence entre le présent et le passé.

 

Henri Lefebvre ajoute « notre civilisation, comme toute réalité, a avancé par bonds inégaux, saccadés ; avec des détours, des sinuosités, de brusques tournants. Les sciences de la nature ont progressé les premières. Pour des motifs très divers, certains secteurs de la connaissance et de la vie sont restés en arrière. Les sciences de la réalité humaine (médecine, physiologie et psychologie - histoire - économie politique et ses applications, etc.) retardent encore sur les sciences de la nature. Quant à la vie pratique et quotidienne - secteur fondamental cependant - elle retarde à tel point qu'elle peut apparaître souvent inchangée ou seulement dégradée (H. Lefebvre, 1947b, p. 262) ».

 

La société est à l’image de l’homme, car l’identité individuelle est la source de l’identité collective. Selon Henri Lefebvre, « la conscience privée et la conscience publique - s’intervertissent, et se pervertissent sans cesse. La société bourgeoise, comme telle est une somme de conscience bourgeoise de classe, c'est-à-dire une conscience publique et extérieure (H. Lefebvre, 19363, p. 239) » (22). Le concept d’identification s’affine selon les groupes ethniques, culturels. Elle s’inscrit suivant la communauté de référence dans laquelle l’individu s’engage. Cependant, d’autres critères d’appréciations entrent en compte : l’époque, le milieu économique et politique. Cette identification consolide une identité collective et une conscience collective, agissant sur chacun par la transmission des règles, des normes et de la morale, entre autre.

 

L’aspect mondialisation tend à vouloir construire l’unité, c'est-à-dire dans le sens d’une seule identité collective au niveau mondial. C’est en somme supprimer l’individualité et la différence. Ce qui peut être appréciable pour certains organismes, les industriels ou les lobbyings, mais peut conduire vers d’autres réalités : l’uniformité peut être la solution aux conflits et aux crises, mais à quel prix ? ! Qui doit s’adapter à l’autre ? Comment instituer de nouveaux compromis ?

 

Cependant, la mondialisation de l’identité serait un tournant de vie d’une grande importance. Denys Cuche précise « l’identification peut fonctionner comme une affirmation ou comme une assignation identitaire. L’identité est toujours un compromis, une négociation entre auto-identité, [...] hétéro-identité [...] (D. Cuche, 2001, p. 87) ». Et j’ajouterais éco-identité.

 

Et, Claude Dubar affirme « qu’il existe un mouvement historique à la fois très ancien et très incertain, de passage d’un certain mode d’identification à un autre. Il s’agit, plus précisément, de processus historiques, à la fois collectifs et individuels, qui modifient la configuration des formes identitaires définies comme modalités d’identification (Claude Dubar, 2000, p. 4) ».

 

Donc, l’identification est un processus naturel, donnant la place à une identité en mouvement, allant vers son dépassement. Par exemple, l’effet de rupture se ressent davantage dans les communautés intergénérationnelles où l’ancien ne se sent plus en phase avec le jeune.

 

Pourtant, si l’on prend en compte la théorie des identités de Paul Ricoeur, il existe deux formes d’identités, la mêmeté et l’ipséïté, de là découlent plusieurs éléments constitutifs de l’identité, de l’être et du mythe personnel et par conséquent de la formation du mythe collectif et d’une identité sociale. Donc, les prémices de la crise sociétale peuvent provenir de crises individuelles, car la déconstruction du mythe collectif provoque une transformation du mythe personnel, et réciproquement l’inverse se produit aussi.

 

Car « c’est la croyance dans l’identité personnelle qui conditionne les formes d’identification sociétaire aux divers groupes (familiaux, professionnels, religieux, politiques) considérées comme des résultantes de choix personnels et non comme des assignations héritées (Claude Dubar, 2000, p. 5) ». Et, « l’émergence de formes nouvelles d'individualité est ici considérée comme le résultat, ni volontaire, ni programmé, de processus modifiant les modes d'identification des individus par suite de transformations majeures dans l’organisation économique, politique et symbolique des rapports sociaux. Aucun accord n'existe parmi les historiens, sociologues ou anthropologues, pour accorder à un processus particulier un rôle déterminant (Claude Dubar, 2000, p. 16) ».

 

De même, si je considère les révolutions comme résultantes de la crise intérieure d’une société, les concepts élaborés autour de la crise individuelle me semblent proches, car ils sont en lien aux contradictions entre une conscience collective aliénante et individuelle aliénée. L’identité est constitutive de la conscience de l’individuel, elle s’identifie au collectif par l’identification. Selon Vincent Gaulejac, l’identité est polysémique, elle est « l’idem », ce qui rassemble et permet de définir l’«être » comme, « caractère de ce qui est identique », l’unité, « caractère de ce qui reste identique à soi-même », la reconnaissance et l’individualisation, le fait pour une personne d’être tel individu et de pouvoir également être reconnue pour telle sans nulle confusion grâce aux éléments qui l’individualisent (article de V. Gaulejac, dirigé par J. Barus-Michel, E. Enriquez et A. Lévy, 2006, pp. 174-180) ».

 

Dans cette analyse du principe de rupture, je me suis davantage centrée sur l’individu. Il est moteur de tout changement. En effet, l’homme prend conscience d’un décalage entre ses besoins et ceux que la société lui apporte, la contradiction s’installe. Ce processus conduit ensuite à des transformations en chaîne car l’homme s’auto-crée continuellement. Pourtant, il serait intéressant de prendre en considération d’autres formes de rupture, à d’autres niveaux, par exemple : la représentation du besoin, de l’outil, de la politique, de l’éducation… car le danger est l’analyse d’un élément isolé, qui tendrait à distinguer la partie comme représentative d’une totalité, alors « que le devenir est un tout. [...] L’analyse brise ce tout. Cependant cette analyse est possible ; [...] elle est un mouvement dans le mouvement ; elle ne le brise irrémédiablement qu’en se croyant achevée et en posant des affirmations absolues (H. Lefebvre, 19407, p. 33) ».

 

Donc, la rupture souligne la fin d’un moment, la fin d’une civilisation, d’une société, puis, l’avènement d’une autre. Elle est l’instant, situé entre les deux moments. C’est le point critique. Le franchissement d’une étape s’exprime par un bond tentant ainsi de dépasser le moment en franchissant la frontière du suivant.

 

(22) Cette citation est reprise du texte La conscience privée, dans la 2ème édition du livre La conscience mystifiée. Il a été écrit en dans les années 1950, il aurait dû faire partie d’un ensemble de trois livres sur la conscience mystifiée, la conscience privée, la conscience sociale (Armand Ajzenberg, p. 235).

 

Sandrine Deulceux

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