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  • : Le blog de Benyounès Bellagnech
  • : Analyse institutionnelle : Théorie et pratique au sein des institutions politiques, éducatives et de recherche. L'implication des individus et des groupes dans la vie politique et sociale.
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1 mai 2011 7 01 /05 /mai /2011 10:40

2.1.3.5. Conclure sur le possible

 

La théorie du possible est « une analyse portant sur les tendances et les virtualités, en tenant compte des obstacles, des causes ou des raisons, des décisions qui auraient pu différer ou entrainer autre chose. La situation privilégiée où naissent les possibles ne va jamais sans risques. Le « réel » alors se pénètre de ces virtualités qui tendent à le nier. Celui que le « réel » obsède ne comprend rien. Ainsi opère le travail du négatif. Ce sont les contradictions et conflits au sein du réel qui font surgir par les problèmes posés, les virtualités. Ouvrant le « réel », l’empêchant de se clore et même de se définir, la conjecture l’emporte sur la structure du réel. L’illusion historique qui se place devant le fait accompli ne comprend plus ce qui s’est passé avant l’accomplissement. Il y a donc un moment dialectique : réel « possible-impossible. Ou même, toujours à trois termes : les décisions, les hasards, les déterminismes (qui existent mais sont toujours multiples, et non unilatéralement déterminants) (H. Lefebvre, 1980b, p. 240) ».

 

Méthodiquement le processus s’organise ainsi par :

 

1) l’analyse des tendances : causes, raisons,

2) l’inspection des virtualités : comme autres possibilités qui peuvent modifier les idées premières et changer le sens des stratégies posées.

3) une recherche et un travail du négatif comme : les contradictions et les conflits au sein du réel (décision) ;

4) la production de nouveaux possibles (hasard) : ils surgissent des problèmes posés et des virtualités,

5) le réel : il est constitué par la détermination des choix (stratégie) et la conjecture qui forment le déterminisme et l’emportent dans la production de la structure du réel.

 

Toutefois, rien ne se réalise toujours tel que chacun le pense ou le souhaite. Les limites sont celles que l’homme et la société s’imposent. La bataille entre le nécessaire et la contingence s’effectue dans la décision des possibles. Lorsque le possible est une nécessité, elle devient réelle et se détermine comme un fait obligatoire. Si elle est contingente, elle se transforme en une éventualité, une possibilité non déterminée. La difficulté souvent est de penser qu’une possibilité peut-être éventuelle. Le piège des possibilités existe car toute proposition faite à autrui qui se pose comme possibilité, dès qu’elle est acceptée s’inscrit comme nécessaire.

 

« La contingence est l’arbitraire, la liberté, la création (H. Lefebvre, 1980b, p. 241) ». [...] « Jusqu'à maintenant les possibilités humaines n'ont été distribuées que parcimonieusement, alors que les « masses » - la communauté humaine - les fondent par leur travail. Par un manque d'imagination qui vient d'un manque de raison (dialectique), la plupart des gens (parmi les «masses» elles-mêmes...) ne pensent pas que les choses puissent devenir profondément différentes de ce qu'elles sont. Ils croient facilement que toujours, à la même place, il y aura la même petite boutique - ou une boutique semblable -, la même maison, le même champ (H. Lefebvre, 1947²b, p. 261) ».

 

Pourquoi ne pas changer ? Laisser les « possibilités nécessaires » et s’orienter vers les contingentes. Penser la nécessité avant tout, c’est peut-être sacrifier l’idée nouvelle, le pourquoi pas ! L’éventualité : c’est ce qui est neuf, qui paraît illusoire car inconnu, comment pouvons-nous croire que ce n’est pas nécessaire ? C’est « après-coup » que l’illusion présente se transforme en nécessité réelle. Ainsi, créer un monde sous le slogan : Changeons la vie !, c’est peut-être aller vers les possibilités contingentes. C’est accepter de ne pas se laisser porter par le sens commun dicté par la conjecture de la société. Elle fixe ainsi un mode de vie dans un espace social « tranquille ». Est-ce le moment d’un nouveau bond ? Comment le définir ? Seule la présentation des possibilités peut en permettre une approche. Il faut rêver le monde de demain et lancer l’utopie comme moteur du changement ; et si c’était possible !

 

Pour Henri Lefebvre, s’arrêter à l’explication du présent par le passé n’a pas de sens. C’est dans le possible (39) que se construit l’advenir, dans une perspective globale, stratégique et réfléchie. Il pense le moment (40). « Il faut surtout montrer l’ampleur, la magnificence des possibilités qui s’ouvrent devant l’homme ; et qui sont si réellement possibles, si proches, si rationnellement réalisables (une fois les obstacles politiques brisés) que cette proximité du possible peut passer pour l’un des sens (péniblement et terriblement inconscient) de la fameuse « inquiétude moderne » de l’angoisse devant « l’existence » telle qu’elle est encore (H. Lefebvre, 1947²b, p. 244) ».

 

Comment changer la vie ? En pensant l’homme dans sa globalité comme oeuvre, car « l’oeuvre rassemble ce qui par ailleurs se disperse » (H. Lefebvre, 1980a, p. 204). Ainsi, comme Henri Lefebvre, « je rêve d’un monde où chacun trouverait son identité en cherchant sa différence (H. Lefebvre et C. Regulier, 1978b, p. 192) ». Dans ce monde utopique (Cf., Charles Fourrier), l’oeuvre de l’homme serait lui-même, maître de son éducation tout au long de la vie pour se produire comme possible (41).

 

(39) « Une analyse portant sur les tendances et les virtualités, en tenant compte des obstacles, des causes ou des raisons, des décisions qui auraient pu différer ou entraîner autre chose. La situation privilégiée où naissent les possibles ne va jamais sans risques. Le «réel» alors se pénètre de ces virtualités qui tendent à le nier. Celui que le « réel » obsède ne comprend rien. Ainsi opère le travail du négatif. Ce sont les contradictions et conflits au sein du réel qui font surgir par les problèmes posés, les virtualités. Ouvrant le « réel », l’empêchant de se clore et même de se définir, la conjoncture l’emporte sur la structure réelle. L’illusion historique qui se place devant le fait accompli ne comprend plus ce qui s’est passé avant l’accomplissement. Il y a donc un moment dialectique : réel « possible-impossible ». Ou même, toujours à trois termes : les décisions, les hasards, les déterminismes (qui existent mais sont toujours multiples, et non unilatéralement déterminants) (H. Lefebvre, 1980b, p. 240) ».

 

(40) « Le « moment » est « la tentative visant la réalisation totale d’une possibilité. La possibilité se donne ; elle se découvre ; elle est déterminée et par conséquent limitée et partielle. Vouloir la vivre comme totalité, c’est donc nécessairement l’épuiser en même temps que l’accomplir. Le moment se veut librement total ; il s’épuise en se vivant. Toute réalisation comme totalité implique une action consécutive un acte inaugural. Cet acte simultanément, dégage un sens et le crée (H. Lefebvre, 1962²a, p. 348) ».

 

(41) Cette idée a été développée par R. Hess dans la dernière conférence du séminaire, lors de sa présentation d’Henri Lefebvre et la pensée du possible, théorie des moments et construction de la personne (Paris, Anthropos, 2009). Par l’entrée dans ses moments, la personne se produit, se « construit comme oeuvre » en relation avec ses « communautés de référence ».

 

Sandrine Deulceux

http://lesanalyseurs.over-blog.org

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