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  • : Le blog de Benyounès Bellagnech
  • : Analyse institutionnelle : Théorie et pratique au sein des institutions politiques, éducatives et de recherche. L'implication des individus et des groupes dans la vie politique et sociale.
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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 10:37

L’an un des analyseurs



Le 11 janvier 2009, notre blog, lesanalyseurs.over-blog.org, a vu le jour avec le premier article intitulé Le Carrefour des labyrinthes, titre emprunté à Castoriadis, pour signifier la complexité du contenu à développer dans ce nouveau support qu’est la publication quotidienne d’articles destinés aux gens que l’on connaît et aussi aux inconnus. Ce fut une aventure lancée avec un minimum d’atouts et de moyens; ce qui comptait à priori c’était le message à faire passer et l’ouverture d’un débat aussi large que possible.


Nouvelle aventure, nouvelle pratique qui ne part pas du vide et qu’il faut resituer dans son contexte:


Sur le plan groupal, les irrAIductibles venaient de perdre, quelques mois auparavant, Georges Lapassade et Aziz Kharouni, deux amis et piliers du groupe de travail qui avaient un rôle important dans le dispositif de la production de la revue Les IrrAIductibles.

Georges Lapassade, en tant que superviseur, conseiller, veillait sur l’avancée du travail, sur le respect des échéances de parution de chaque numéro de revue et assurait par ailleurs des contacts avec des collaborateurs. Il n’a à aucun moment été absent des réunions du comité éditorial, sauf lorsqu’il se trouvait en voyage et même dans ce cas, il n’hésitait pas à téléphoner de l’étranger pour avoir des nouvelles. Il tenait à suivre le processus de sa conception à la distribution et à la diffusion des numéros parus.

Aziz Kharouni a rejoint les IrrAIductibles en 2003 et est devenu très vite, non seulement membre actif mais militant irrAIductible; il avait été auparavant militant pour d’autres causes et savait pertinemment qu’un dispositif doit être tenu et maîtrisé. Un collectif pour lui signifiait des engagements les uns vis-à-vis des autres quant aux différentes tâches à accomplir. Cette posture donnait lieu souvent à des incompréhensions à partir du moment où la majorité des membres du collectif adoptait la posture passive consistant à attendre d’être servi par les plus actifs. Tout en assurant une présence quotidienne à la fac en salle A428, il a décidé de s’engager dans la rédaction de sa thèse, thèse qu’il n’a pas eu le temps de terminer. Le suivi de la revue était pour lui primordial.


Nous étions un peu plus de 300 à avoir participé d’une manière ou d’une autre aux 14 numéros publiés de la revue Les irrAIductibles et nous avons chacun un point de vue sur cette expérience. La disparition de deux membres actifs aurait été l’occasion de s’interroger sur la suite!


Sur le plan institutionnel, l’année universitaire 2008-2009 restera dans les mémoires pour les raisons que tout le monde connaît. Elle marque en effet le passage en force de la réforme dite autonomie des universités et ce malgré la résistance de la majorité de la profession. Cette réforme est la phase ultime d’un processus programmé plusieurs années auparavant et qui avait commencé par la mise en place du LMD pour se conclure par la loi sur l’autonomie. Les effets immédiats de ces réformes sur le fonctionnement, sur l’organisation des études universitaires se sont traduits rapidement par une sorte de perte de repères ressentie sur le terrain. N’ayant l’habitude de ne parler que de ce que l’on observe, nous avons très vite constaté que la fac est devenue une sorte d’administration de gestion de flux de dossiers, d’examens, de groupes, de comptabilité, de validation à tel point que le déplacement à la fac est vécu comme une escale pour régler un problème d’ordre purement administratif. La gestion prend le pas sur le savoir. Les marges de pensée qu’offrait l’université disparaissent petit à petit. Les 40 ans de Vincennes n’étant qu’une parenthèse qui ne tarde pas de se refermer. Notre groupe subit de plein fouet ce chamboulement, en se prêtant aux nouvelles règles du jeu administratif: rattachement au laboratoire, coquille vide, séparation entre les 3 niveaux du LMD en privilégiant les formes sur les contenus, les validations et invalidations semestrielles, multiplication des EC. Tout geste au sein de la fac doit être précédé d’une ou de plusieurs demandes d’autorisation administratives à tel enseigne qu’un travail de recherche de plusieurs années n’a de valeur que si son auteur réussit à franchir les barrages administratifs.


Il ne faut pas perdre de vue que ce qui précède est à son tour à inscrire dans un contexte politique plus global dont nous avons, avec d’autres, relevé et signalé les analyseurs dès les débuts de la décennie (voir le n°1 de la revue
Les irrAIductibles).


Dans ma recherche sur la pédagogie du possible, j’avais mis l’accent sur la dialectique entre le possible, le probable et l’impossible. Se situer dans le probable c’est espérer que ce que l’on vise c’est sa négation par le possible; il se peut aussi qu’il soit nié par l’impossible. La volonté et la liberté sont encadrées par les conditions de leur réalisation ou non, par la possibilité ou non de mettre en œuvre des dispositifs adaptés aux visions et aux objectifs négociés démocratiquement par les différents acteurs. Compte tenu du contexte décrit sommairement ci-dessus, j’en déduis que les conditions de la mise en œuvre de la pédagogie du possible dans ce cas précis ne sont pas favorables et que l’institué est en position de force étouffante. Que faire donc? Se coucher ou tenir le coup!


René Lourau disait qu’il écrivait le journal pour tenir le coup. Depuis, notre courant a bien avancé dans la pratique du journal et dans sa théorisation. Quant à moi, pour tenir le coup, je décide de créer ce blog. Ainsi, je le conçois, d’une part, dans la continuité du travail collectif mené dans le cadre des irrAIductibles depuis plusieurs années sur maints chantiers restés en friche. Tous les irrAIductibles sollicités pour participer à cette aventure ont répondu présents et ont accepté de collaborer à ce travail; et d’autre part, dans la rupture avec les facteurs de blocage qui réduisaient nos activités et nos rencontres à des rituels de bavardage reprenant les problèmes récurrents dont les solutions ne peuvent être envisagées que dans une lutte politique et idéologique radicale; je cite la précarisation, l’exclusion, le racisme, la concurrence et la lutte de places. René Lourau disait qu’il ne suffisait pas de constater la division sociale, mais qu’il fallait la combattre.


Techniquement, le blog nous permet de nous situer hors les murs et du même coup il nous éloigne de toute tentation sectaire, qu’elle soit géographique, disciplinaire, institutionnelle ou sociale, du moins au niveau virtuel.


Sans préalables, par le biais de ce blog, nous arpentons des chemins inconnus et notre réflexion se poursuit dans tous les sens. Il a fallu classer le blog dans une catégorie et nous avons choisi la politique comme recours en dernière instance ou en dernière analyse, car si nous ne nous occupons pas de la politique, elle s’occupe bien de nous, pour paraphraser Engels.


L’anniversaire est habituellement l’occasion des bilans, ce que nous ne ferons pas aujourd’hui et nous laissons à nos collaborateurs, utilisateurs et lecteurs le soin de cette tâche qui s’inscrit dans la continuité du blog.


Le 11 janvier 2000 René Lourau nous a quitté. Dix ans après, son œuvre continue de nous inspirer. En publiant dans ce blog, René Lourau et la fondation de l’analyse institutionnelle, Remi Hess est notre représentant dans le meilleur hommage que l’on puisse rendre à R. Lourau en nous aidant ainsi à rester sur ses traces.


Benyounès Bellagnech
http://lesanalyseurs.over-blog.org 

 

 

 


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commentaires

R
<br /> Merci pour cet article. Hier, j'ai reçu un appel de Michel Blondeau, heureux de lire les premières pages du texte écrit autour de 2001, sur René Lourau. Il me demande de donner à Benyounès la suite<br /> de ce texte. Je vous promets de le relire et ainsi proposer la suite, ici même, de ce livre oublié.<br /> <br /> <br />
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