Dimanche 21 juin, 14 h 30
Je suis heureux à Sainte Gemme. Luc aussi. Nous allons bientôt reprendre la route pour Paris. J’ai coupé plusieurs kilos de salades. Les oignons sont gros. J’emporte une quinzaine… Nous avons aussi beaucoup de cerises. Ce matin, j’ai fait du jardin et je suis heureux de ce que j’ai fait.
Aujourd’hui, j’ai bu beaucoup d’eau; contrairement à hier où j’avais bu bière et vin.
La météo nous annonçait de la pluie. J’ai eu un beau soleil dans le jardin toute la matinée. Il faisait chaud. Maintenant, le ciel s’est couvert.
Dois-je remporter du vin pour le colloque G. Lapassade? Lucette ne me répond pas quand je lui pose la question.
J’aimerais bien faire une sieste. Hâte d’être en vacances pour faire de la peinture: ce moment me manque. Cela finira par se remettre en place!
Lundi 22 juin, 10h
Lucette est partie à l’Université. J’ai pris le temps d’écrire une longue lettre à Geneviève sur mes relations avec ma fille Hélène.
Je voudrais répondre à la très belle lettre que Gaby m’a fait parvenir hier. Depuis, j’ai reçu mon courrier de Barbara Michel qui va mettre H.L et la pensée du possible sur sa bibliographie de l’année prochaine. Par où commencer? Tout à l’heure, je vais aller chercher Elena Theodoropoulou à l’aéroport (13h). Ma vie va changer jusqu’au 7 juillet.
Gaby vient à Paris du 29 au 30 juin….
Une idée: ma vie est trop remplie. Je ne laisse pas assez de place pour le rien… Hier, dans le jardin, le matin, bonheur d’être planté là, sans autre programme que de vivre la présence aux arbres, aux plantes, aux fleurs. Je n’aurais pas être un jardinier professionnel, parce que je vis la position d’amateur avec une vraie jouissance.
L’art d’être amateur. Je pense que je suis un père amateur: je ne suis pas un professionnel. Je me plais à être un père non-conformiste, encore que le conformisme ne soit pas absent de la posture non-conformiste.
Je puis me passer de voir mes enfants. L’absence est une composante de mes relations avec les gens que j’aime. Je préfère vivre l’intensité d’un moment à sa durée, à sa permanence. S’il y a permanence, il n’y a plus de moment. L’absence provoque un certain type de méditation.
Lucette semblait en colère ce matin au moment où elle est partie pour la fac. Colère est trop fort. Le mot ne convient pas. Elle vivait un désagrément dans le fait que je reste à la maison. Elle aurait voulu me voir partir pour la fac. C’est là-bas qu’il devait se passer quelque chose. Moi, je pensais qu’il n’y avait rien à faire, avant d’aller chercher Elena à l’aéroport.
Ce matin, j’avais rangé la salle de séjour…
L’incompréhension entre Lucette et moi vient du fait que l’on ne parle pas ensemble. J’assiste à la préparation du colloque, plus que j’y participe. Lucette tient une place de méta-organisatrice, mais je ne vois pas le rôle qu’elle voudrait me donner. Il semble que cela va de soi, pour elle.
Hier, j’ai réussi à obtenir que l’on apporte du vin de Sainte Gemme… Il m’a fallu deux jours d’attente pour avoir une réponse à cette proposition… Cependant, je ne précipite rien. Je laisse Lu gouverner.
Je pense que ma lettre à Geneviève est bien, mais pas suffisamment dialectique. Il aurait fallu montrer en quoi mon refus du tout-école n’est pas un refus de l’école, en quoi le passage en seconde de Romain est un vrai bonheur pour moi. En même temps, je suis solidaire de deux jeunes qui redoublent une 3ème et une seconde… Je comprends qu’ils aient eu à faire autre chose que d’investir sur le moment de l’école.
Ce qui me plait dans le succès de mon fils, c’est qu’il entrera en fac avant que je ne prenne ma retraite. Pour moi, c’est vraiment important. Je lui avais expliqué le pourquoi l’été dernier.
13h
L’avion d’Elena a ¾ d’heure retard. Je vais prendre le temps de manger une assiette de charcuterie… J’ai bien fait de prendre ce Journal des idées sur moi, mais quelle idée avoir quand on a le ventre vide?
Je puis restituer deux choses:
-J’ai écrit un courrier à ma sœur Geneviève, pour lui donner ma version de mon différend avec Hélène.
-J’ai repris le sujet dans mon courrier à Gaby, en le rendant plus lié à deux autres sujets: la sortie du livre de Lethierry; l’émission de Charlotte et Valentin sur Badiou.
Cela va étonner Gaby que je puisse faire une «étude de cas» du différend avec Hélène. Ce cas est sobrement présenté. Je ne veux pas faire une fixation sur ce différend avec Hélène. J’ai regretté de ne plus pouvoir lui parler au moment des Européennes. En 1999, nous avions beaucoup parlé politique ensemble… Quelle place est-ce que je donne à la famille dans ma vie? Nous sommes à la fois très proches, et en même temps très loin. Je me suis souvenu tout à l’heure que…
On m’a apporté le plat de charcuterie. Je l’ai dévoré, et mon idée s’est envolée. Je ne devrais jamais suspendre mon écriture au milieu d’une phrase.
Remi Hess
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