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Lecture du livre de Mireille CIFALI, Le lien éducatif : contre jour psychanalytique (1)
Dans son avant-propos, l'auteur précise que les discours sur l'éducation relèvent d'une subjectivité qu'il faut assumer car ils sont datés et marqués par la culture à l'intérieur de laquelle ils ont été élaborés. Du fait de l'évolution constante de ces discours, la modestie est donc de mise.
Dans cet ouvrage, l'auteur confrontera la théorisation psychanalytique avec un domaine « tiers », l'éducation. Pour elle, la position psychanalytique est celle « qui permet aux praticiens, sans céder sur la complexité de leurs actes, de construire un savoir de l'intérieur ». (2)
La première partie de l'ouvrage est nommée Espoirs déçus et son chapitre premier Au fil de l'explication et du temps.
Ce chapitre débute par la définition de la pédagogie par Cornélius Castoriadis : « La pédagogie commence à l'âge zéro et personne ne sait quand elle se termine. L'objectif de la pédagogie, d'un point de vue normatif évidemment, est d'aider le nouveau né, ce hopefull & dreadfull monster à devenir un être humain. » (3).
L'auteur souligne que l'éducation est un enjeu de société. C'est un acte qui relève de la relation et alors qu'il est accompli pour le bien de l'enfant, celui-ci se déroule souvent dans la souffrance. L'adulte, « un vieil enfant », y projette ses espoirs, se reproche ses erreurs, cherche d'autres coupables aux échecs qui se manifestent.
Dans un premier passage, Les difficultés auscultées (p 14-26), l'auteur recense les hypothèses qui cherchent la source de cette difficulté à éduquer. Cela commence avec Freud qui découvre dans le propos des hystériques (discours de victimes d'une séduction), l'importance du rôle de l'adulte. Ce propos sera repris plus tard par Alice Miller qui dit que les adultes malades, souffrants sont des enfants traumatisés par l'éducation qu'ils ont reçue. Elle appelle cela la pédagogie noire qui au nom du bien de l'enfant lui fait du mal.
A partir de là, c'est le comportement de l'adulte qu'il faut modifier. L'auteur précise que durant toute une période, la pédagogie était assez normée mais que maintenant, avec la multiplicité des théories, les adultes piochent dans une sorte de bric à brac dans lequel se débat leur imaginaire.
Freud par la suite renoncera à cette explication de l'adulte coupable de séduction lorsqu'il mettra en évidence le rôle du fantasme. L'enfant peut interpréter les actes de l'adulte, croire à une tentative de séduction qui, en fait, n'a pas eu lieu. Cette hypothèse permet de développer des pratiques destinées à accompagner l'enfant, à faire avec ce qu'il reçoit comme éducation.
On voit que ces hypothèses mettent en évidence le coupable de l'échec ou de la souffrance due à l'éducation. Pour l'une c'est l'adulte, pour l'autre, c'est l'enfant.
Une des autres hypothèses évoquée par l'auteur, est celle posée originellement par Carl Gustav Jung puis par Lacan et Dolto et qui met l'accent sur le concept de « folie à deux ». L'enfant porte l'histoire familiale, les traumatismes inconscients des parents, et ce qui est important c'est de savoir ce qu'il va en faire.
Qu'est-ce qu'un traumatisme? « C'est un événement de sa vie qui se définit par son intensité, et surtout par l'incapacité où un sujet est placé d'y répondre adéquatement et de lui trouver un sens » (4). pour ne pas souffrir, la personne va le refouler, l'oublier mais il ressurgira dans une situation ultérieure qui fait lien avec l'évènement créateur du traumatisme, même s'il n'a rien à voir réellement avec lui. Pour éviter le refoulement, il faut que l'enfant puisse parler du traumatisme, mais souvent, croyant bien faire, les adultes l'entourent de silence. Et permettent ainsi le développement de la réaction pathologique. La mère joue le rôle de pare-feu contre les traumatismes du petit, mais elle ne peut le protéger de tout.
Il existe des hypothèses non psychanalytiques à l'échec de l'éducation, elles s'appuient sur le contexte social et familial (hérédité) de celle-ci.
En matière d'éducation et de son échec, on recherche toujours le coupable chez l'autre, le parent, l'enseignant, l'enfant. Il est important pour celui qui participe à l'éducation de l'enfant d'analyser sa propre implication.
S'il n'y a pas d'éducation idéale, on peut quand même éviter un certain nombre d'erreurs notamment celles qui relèvent de la séduction et de la violence.
Dans un second passage, Mireille Cifali liste les métiers/statuts (soignant, enseignants, parents) confrontés à la question de l'éducation et retrace l'historique de leurs relations conflictuelles teintées de rivalité.
Elle termine ce premier chapitre par l'évocation de Freud lorsqu'il dit qu'il existe des métiers impossibles, éduquer-guérir-gouverner dans le sens où l'objectif qui leur est assigné n'est jamais atteint complètement. Comment, dans ce cas, parler de réussite ou d'échec? « On assure parfois que le succès d'une éducation résiderait précisément en ce que celui qui en est l'objet la contrecarre pour advenir en différence et en séparation. » (5).
L'auteur relie l'impossibilité de ces métiers aux propos de Maurice Blanchot sur la création de l’œuvre qui passe par une acceptation de son inachèvement.
Lors de ma lecture, en dehors de la question de l'inachèvement qui alimente mon travail sur l'ouvrage de Lapassade, je me suis demandée si la fin du chapitre ne posait pas une analyse dialectique et notamment de la manière dont Augustin la présente sur son profil de la plateforme « prendre en compte-rendre compte ». La réussite de l'éducation c'est lorsqu'on arrive à dépasser ce qui nous a été donné, pour en faire autre chose qui nous soit singulier.
Je me rends compte par mon travail sur le livre de Cifali et les séquences du cours sur le journal que des grands pédagogues que je n'ai pas étudiés sont cités, Dolto, Korzack et je me dis que puisque je dois passer par le rattrapage du cours d'Augustin, je vais peut-être les étudier.
8h50
Hélène M.
http://lesanalyseurs.over-blog.org