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  • : Le blog de Benyounès Bellagnech
  • : Analyse institutionnelle : Théorie et pratique au sein des institutions politiques, éducatives et de recherche. L'implication des individus et des groupes dans la vie politique et sociale.
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4 octobre 2013 5 04 /10 /octobre /2013 15:36

 

Utopies en tant qu'ancres symboliques (3)

 

 

S'il est fondamental, d'une part, de récupérer dans l'archéologie de nos origines, une identité, même naissante, mais qui nous informe de quelques traits de notre héritage, nous devons d'autre part rapidement dire qu'elle ne suffit pas. Il faut la confronter à une altérité qui l'incite, qui la transforme, qui la questionne. La confrontation avec la diversité est fondamentale pour interroger les compulsions conservatrices du « soi-même » et ouvrir des brèches dans l'identité. Sur ce point, le dessin le plus clair est celui d'une zone de frontière qui nous montre combien nous nous approprions un sens essentiel quand nous touchons la terre de l'autre. C'est pour cette raison qu'Heidegger tenait à dire qu'une frontière n'est pas le point où quelque chose finit, mais, comme les Grecs l'ont reconnu, le point à partir duquel quelque chose commence à se faire présent.

 

 

Penser en termes de production culturelle dans notre contemporanéité implique nécessairement de remettre en question l'isomorphisme classique entre espace, lieu et culture. Lorsque nous parlons de cultures nationales, nous effaçons certaines frontières qui, même minoritaires, ne se reconnaissent pas dans l'hégémonie du concept. De nombreux penseurs ont dernièrement travaillé dans cette direction. L'un d'eux, Homi Bhabha, affirme même que « ce qui est théoriquement novateur et politiquement crucial, c'est le besoin de dépasser les récits de subjectivités originaires et initiales et de souligner ces moments ou processus qui sont produits dans l'articulation   des   différences   culturelles » (1).  Ce   carrefour de territoires, s'il est apparemment consensuel, révèle cependant aussi ses impasses, et notamment la voracité de certaines formes qui ne tolèrent pas ce qui est divergent. Les formes d'exclusion qui discréditent tout effort de changement du lien social sont multiples. Même les groupes apparemment unis et « harmoniques » connaissent ce danger et se ferment à double tour. Quel est le point de silence dans un groupe donné ? Or ce qui unit un collectif, ce sont certes son langage, son histoire, ses rituels, mais surtout les limites de son langage. Daniel Sibony, dans son magnifique essai sur le racisme (2), nous montre que c'est autour de ce point de silence que travaille la fonction d'exclusion : si un membre du groupe évoque un point de silence, il risque l'exclusion. Le groupe a besoin de cette fonction pour garantir son existence. C'est ce qui conduit le groupe à être un ensemble de personnes décidées à se taire sur la même chose, à protéger cette chose et à se protéger contre elle. Nous percevons ici une forme d'existence qui s'appuie sur l'exclusion, Cependant, nous voyons l'importance qu'il y a à aborder ce fantasme qui cherche à contrôler l'identité d'un collectif. Serions-nous à la hauteur pour intervenir sur ce point avec nos idées et nos actions ?

 


(1) BHADHA, Homi, O local da cultura, Belo Horizonte, Editora UFMG, 1998, P20.


(2) SIBONY, Daniel. Le « racisme » ou la haine identitaire, Paris, Christian Bourgois, 1997.

 

 

 

Edson Luiz André de Sousa

 

Mis en ligne par Benyounès et Bernadette Bellagnech

 

 

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