Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Le blog de Benyounès Bellagnech
  • : Analyse institutionnelle : Théorie et pratique au sein des institutions politiques, éducatives et de recherche. L'implication des individus et des groupes dans la vie politique et sociale.
  • Contact

Recherche

17 juin 2011 5 17 /06 /juin /2011 10:19

1.1.2.2 Paris : Changeons la vie !

 

À Vingt ans, H. Lefebvre regagne Paris, et participe à différents mouvements. Nous sommes au lendemain de la Première Guerre mondiale. C’est la naissance du mouvement Dada, le début des Surréalistes, un groupe qui aspire à un monde meilleur. Il s’inscrit à la Sorbonne pour des études supérieures en philosophie. En 1922, il rencontre en ce lieu Pierre Morhange, Georges Politzer, Georges Friedmann; ils forment alors le groupe des philosophes. Leur désir est de se confronter au groupe des poètes, c'est-à-dire les Surréalistes. Henri Lefebvre est depuis toujours attiré par l’avant-garde, il veut la vivre et la comprendre car il ressent dans cette avant-garde, l’essence du changement, une nouvelle conception de la vie. Pourtant, il reste en alerte car il pense que l’avant-garde comme la modernité est suspecte, car aucune vision concrète sur l’avenir n’apparaît clairement. En cherchant sa voie, le groupe des philosophes se différentie des philosophes de renom de l’époque, comme Henri Bergson et Léon Brunschvicg. À cette période, Henri Lefebvre et ses congénères transforment le mystique religieux en mysticité qu’ils nomment païenne relevant des lectures de Spinoza et Schelling : «c’était le non-intellectualisme, la non-cérébralité et, confusément l’appel au corps, à travers une ontologie et une cosmologie que nous arrivions mal à définir. Ce n’était pas l’appel à l’irrationalité, mais plutôt à une surrationnalité (H. Lefebvre, 1975a, p. 39) ». En 1924, il terminera ses études supérieures en écrivant un mémoire tourné vers Pascal et le Jansénisme. Léon Brunschvicg, définira ce travail comme pas « assez précis, trop interprétatif, trop subjectif (H. Lefebvre, 19594, p. 371) ».

 

Sa rencontre avec Max Jacob a été marquante aussi. Ce poète le renvoie encore vers les aspects religieux de son vécu. H. Lefebvre le décrit comme un homme qui parlait sans relâche et décrivait des situations avec un «discours charriant un torrent d’images et des symboles» (H. Lefebvre, 1975a, p. 40) ». M. Jacob avait une théorie de l’imaginaire poétique, un côté mystique qu’il exposa à H. Lefebvre en des termes très élaborés. Pourtant dans un commentaire, il ajoute que malgré « sa contemplation de l’ineffable individuel. Mais, en Max, il y avait aussi l’envers, presque surréaliste, encore qu’il détestât les Surréalistes, de cet aspect concret, c’était le mystique. [...] max attribuait aux mots et aux images non pas la valeur de signes, mais celle des messages, et même des messagers. Curieux mélanges de mysticisme chrétien et de paganisme (Henri Lefebvre, 1975, p. 42 et 43) ». Les rencontres se terminèrent lorsque M. Jacob apprit l’appartenance d’H. Lefebvre au Parti communiste. Il rompit alors tout contact car il pensait que les communistes lui causeraient sa perte.

 

En 1924, Henri Lefebvre commence à écrire des articles dans la revue Philosophie. Le premier sera consacré à Dada ce qui lui valut d’être reconnu par les membres du groupe des Surréalistes. Le groupe des philosophes était déjà en contact avec eux. Ils écrivaient des textes et des manuscrits ensemble. Leur objectif était de répondre au changement du monde actuel. H. Lefebvre s’accordait avec eux, sur comment donner un nouveau sens à la vie, mais il divergeait sur les entreprises réelles des Surréalistes. Leur projet semblait ne correspondre qu’à un vide, sans donner une clarté conceptuelle telle que l’entendait H. Lefebvre dans sa Critique de la vie quotidienne ou bien en recherche de slogan vrai comme « Prolétaires de tout pays unissez-vous (H. Lefebvre, 1975a, p. 47) ». Pourtant, ces deux groupes eurent le souhait de fusionner. Pierre Morhange qui était un fervent croyant d’origine judaïque, et un peu le leader du groupe, demanda à H. Lefebvre de refuser l’association car Dieu les divisait. H. Lefebvre s’obligea à faire cette déclaration lors de la réunion de la centrale surréaliste, alors que l’idée même de le dire le répugnait. Par la suite, lors d’une entrevue avec André Breton, celui-ci l’engagea à lire Hegel, La logique. Cette lecture l’amena par la suite à lire Marx et à en défendre ses idées, voire même à s’insurger contre ceux qui déformaient le sens des concepts. Plusieurs de ses livres seront déterminants dans la promulgation du marxisme et lui vaudront les foudres du Parti.

 

En 1925, il s’insurge avec le groupe des Surréalistes et des philosophes en s’alliant aux idées du Parti communiste pour discuter contre la guerre du Maroc (la guerre du Rif). Puis, au cours de l’année 1926, Henri Lefebvre effectuera son service militaire qu’il terminera en novembre 1927 (aucune destination n’est évoquée). Il l’avait retardé au maximum, mais à vingt-six ans, il était temps de faire ce pas. Ses débuts à la caserne furent compliqués. Il se créait des mondes imaginaires pour tenter de percevoir autrement les ordres à suivre. Pourtant, à la suite d’une affaire de «désordre et indiscipline », son supérieur le condamna à des jours de prison. Il en fut épargné, sauvé par un adjudant qui était indigné par le sens qu’avait pris cette affaire. À partir de ce moment, la posture d’H. Lefebvre change. Il s’intéresse au côté stratégique des campagnes militaires et débute des lectures du général Foch. Il couvre des carnets de notes sur la tactique et la stratégie. Son objectif était de l’appliquer à comprendre la révolution mondiale. D’écrire un livre sur L’homme et le soldat. Cette période à tendance à séparer les membres du groupe des philosophes, chacun part dans des directions opposées pour faire son service.

 

En 1928, Henri Lefebvre et les membres du groupe des philosophes adhérent au mouvement communiste. Ce mouvement non institutionnalisé ne portera le nom de Parti que bien plus tard. H. Lefebvre explique : qu’«après une longue réflexion, en liaison avec la réflexion parallèle du groupe des Surréalistes, en même temps que mes amis du groupe des philosophes. Nous étions tous d’accord avec les poètes sur le principe de l’adhésion au mouvement révolutionnaire (H. Lefebvre, 1975a, p. 62)». Il pense y trouver une réponse à cette volonté d’aller vers un autre avenir et que le Parti prépare la révolution tant attendue. Il croit au marxisme et se dit trouver dans ce mouvement l’application propre des concepts de Karl Marx. Pourtant, sa vision de l’U.R.S.S. et des pratiques des soviets reste encore bien naïve. Par ailleurs, le fait qu’H. Lefebvre ait lu Marx le différencie des autres membres du Parti car le communisme n’est pas forcément le marxisme. Henri Lefebvre qualifie même ces jeunes militants comme empiristes. Pour eux, seule la classe ouvrière restait à sauver ce qui correspondait à l’idéal à défendre.

 

Sandrine Deulceux

http://lesanalyseurs.over-blog.org

Partager cet article
Repost0

commentaires