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Analyse institutionnelle : Théorie et pratique au sein des institutions politiques, éducatives et de recherche. L'implication des individus et des groupes dans la vie politique et sociale.

Comment produire notre livre sur le journal d'intervention : entretien avec Remi Hess (6)

Comment produire notre livre sur le journal d’intervention ?

Entretien avec Remi Hess (6)

 

 

Pédagogie du journal

 

 

Pour le moment, ce mouvement que je cherche à décrire manque de coordination. Nous sommes une petite aristocratie de gens qui écrivons des journaux. Dans ce sens, je suis un bourgeois ; les gens qui souffrent, qui sont dans la survie, n’ont pas l’énergie d’écrire. C’est le défi du journal : comment le démocratiser ? Comment faire écrire les gens que tu accompagnes ? On ne peut pas écrire à la place de ces personnes, les SDF par exemple. Et puis, les gens qui aident les autres, il faut aussi les aider. C’est un problème politique.

 

Pendant un certain temps, je n’avais pas compris que la pédagogie frontale n’avait aucun effet sur le changement de comportement : ce n’est pas parce que je dis que le journal est très bien, que les gens vont en tenir un ! Il faut qu’ils en aient un dans les mains, pour être convaincu. L’initiation au journal ne se fait pas sous forme de cours, mais sous forme d’échanges d’expériences : il faut qu’on voit comment c’est fait. On tourne depuis 30 ans autour de ces questions : journal- intervention- pédagogie. Comment transmettre la pédagogie du journal ?

 

Peut-être que notre effort d’écrire plusieurs livres sur le journal d’intervention, le journal de recherche, etc. va créer une dynamique qui va faire descendre les fameux « aristocrates » vers le social ? Peut-être est-on à la veille d’une Révolution ? Armando Zambrano dit que la différence entre Philippe Meirieu et moi, c’est que moi, je tiens mon journal. C’est un petit rien, cette petite différence entre écrire ou de pas écrire son journal, mais c’est beaucoup, car entre le diariste et l’autre, il y a une différence dans la qualité d’observation : on ne voit plus les mêmes choses.

 

Dans notre travail, ce qui est intéressant, c’est de se remettre à écrire ensemble pour évaluer notre pratique. Au lieu de faire des interludes imaginaires, nous allons faire de vrais interludes avec des gens qui ont envie d’évaluer ce qu’est le journal aujourd’hui. Si on fait 3 heures de dialogues, donc 3 interludes, on pourrait décrire l’état du social et ce qu’on a à apprendre de l’époque où nous vivons, et comment nous pouvons utiliser notre manie, comme outil d’intervention.

 

Car, dès qu’on ouvre un journal sur un thème, on en fait « une occasion prochaine » d’intervention. Un journal de recherche, c’est déjà une recherche ; et, d’une certaine manière, c’est déjà une intervention. Nous sommes à la fois très sérieux dans ce que nous faisons du fait de la durée de notre implication, mais, en même temps, aujourd’hui, il semble nous manquer encore une petite étincelle pour une théorisation forte, afin que notre geste esthétique devienne politique. Cette prise de conscience a provoqué chez moi une crise par rapport à cette commande de Renato Curcio ! Je ne veux pas faire du copier-coller. Comment faire de ce livre une véritable intervention, si on veut donner à notre manie une force de changement aujourd’hui ?

 

 

Entretien avec Remi Hess réalisé par Anne-Claire Cormery

http://lesanalyseurs.over-blog.org

 
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