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24 janvier 2014 5 24 /01 /janvier /2014 14:04

 

CHRONIQUES POLITIQUEMENT INCORRECTES NO 25

 


Presse écrite, blogs : silences, censures et liberté.



La presse écrite est en crise paraît-il. Le quatrième pouvoir s’effrite. Elle n’a plus le monopole de l’investigation, des révélations… et de la censure. Existe aujourd’hui « Internet ». Ce qui n’est pas découvert par elle, ou si cela l’est mais est censuré, et cela arrive, est révélé ailleurs : sur les « sites » et les « blogs ».



On se souvient de l’appel lancé par des personnalités lyonnaises (l’anthropologue Charles Gardou, le directeur d’un magazine : Jean-Marc Maillet-Contoz et la députée européenne et aussi adjointe au Maire de Lyon Sylvie Guillaume) pour la création d’un mémorial en hommage aux personnes handicapées victimes du régime nazi et de celui de Vichy. Appel qui rappelle que « 275 000 enfants ou adultes affectés d’une déficience mentale ou physique furent assassinés dans le cadre d’Aktion T4, un programme terrible mis en œuvre par le troisième Reich ». Il signalait qu’en Allemagne un site commémoratif dédié à ces victimes allait ouvrir ses portes à l’automne 2014. Qui ajoutait qu’en France 50000 personnes internées dans les hôpitaux psychiatriques, sous le régime de Vichy, étaient mortes par abandon, absence de soins, sous-alimentation et autres maltraitances. D’où la pétition pour la réalisation d’un mémorial qui leur soit, chez nous, dédié. Cet appel lancé en novembre 2013 a recueilli au moment où ces lignes sont écrites plus de 7 000 signatures.

La presse nationale écrite a gardé, jusqu’à maintenant, sur le sujet le silence alors que sur le « net » la pétition est de plus en plus relayée. Peut-être ce silence sera-t-il rompu à la faveur de sa présentation à la presse le 27 janvier prochain ? Il est vrai qu’il s’agit pour cette presse d’un sujet tabou. Si toutefois ce silence peut persister chez celle-ci, il est impossible sur Internet.



La preuve, voici, à titre d’exemples, des sites qui en parle :


- Mediapart, bien sûr, dans les pages « cultures » ;

- le journal « La Croix », sur son site ;

- Entre les lignes entre les mots ;

- les AZA ;

- Les Analyseurs, le blog de Benyounès Bellagnech ;

- Change.org, d’où a été lancée la pétition ;

- Handirect ;

- G.I.H.P.-MIP ;

- l’APF en Essonne (91) ;

- Handicap.fr ;

- IZUBA ;

- FAIRE FACE ;

- Le blog de hugo ;

- Handicapinfos.com ;

- Sans raison apparente (sur les blogs du journal « Libération ») ;

- Odile, solidaire et combative ;

- ADAPEI de l’Ariège ;

- Hamploi.com ;

- ENSEMBLE, Front de gauche ;

- Collectif, Plus digne la vie ;

- La déficience intellectuelle dans le monde ;

- Espace Éthique, région Ile-de-France ;

- UNAPEDA ;

- Roger Romain de Courcelles ;

- Arieda ;

- être, handicap information ;

- Éthique et finitude par Danielle Moyse (sur les blogs du journal « La Croix ») ;

- Autisme Basse Normandie ;

- Délégation départementale APF du Bas-Rhin ;

- l’AAVPF ;

- Facebook(s)



Silence jusque là dans la presse écrite à propos, entre autres, de cet appel pour un mémorial dédié aux victimes handicapées mentales résultant de l’abandon à la mort par le régime de Vichy : essai d’explication.


« Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’État français » déclarait le Président de la République, Jacques Chirac, le 16 juillet 1995, commémorant les rafles de 1942 et la déportation vers l’Allemagne des juifs de France. Pour la première fois la complicité de l’État français dans ces déportations était reconnue. Un tabou était tombé.



Pourtant : « Notre pays, depuis un peu plus de trente ans, a été de drame national en drame national. […] Alors, … je me sens le droit de dire : allons-nous éternellement entretenir saignantes les plaies de nos désaccords nationaux ? Le moment n’est-il pas venu de jeter le voile, d’oublier le temps où les Français ne s’aimaient pas, s’entre-déchiraient et même s’entre-tuaient ? » avait déclaré Georges Pompidou le 21 septembre 1972. Il est nécessaire de « mettre un terme à la guerre civile permanente entre français » déclarait Mitterrand une vingtaine d’années plus tard. « Le devoir de mémoire donne-t-il le droit d’ouvrir un procès perpétuel à la génération de la guerre ? » écrivaient Henry Rousso et Éric Conan en 1994. Et ils répondaient NON : « l’obsession du passé, de ce passé-là, n’est qu’un substitut aux urgences du présent ».



Ainsi, jusqu’à cette date, « des gens très bien » pouvaient se satisfaire des prises de position de ces Présidents. Après le pavé dans la mare de Jacques Chirac, les « gens très bien » durent admettre alors, à contre-cœur peut-être, la responsabilité de l’État français dans la déportation des juifs de France. Pas dans celle des fous ! C’en était trop pour eux.



En 2007, à la sortie de l’ouvrage d’une historienne, Isabelle Von Bueltzingsloewen – « L’hécatombe des fous », ce fut chez les « gens très bien » le soulagement. « Le régime de Vichy est enfin innocenté d’avoir programmé un génocide » s’écria un journaliste de Rivarol, reprenant un compte rendu publié dans Le Monde, et y voyant une revanche à propos du tabou levé par Jacques Chirac. Déjà en 1989, l’historien Henry Rousso, toujours lui, posant cette question : Vichy responsable de l’abandon à la mort des malades mentaux ? Répondait : « il semble bien qu’il s’agisse d’un pur procès d’intention et non d’une réalité ». Et décrétait : « Le placard vichyste est déjà bien encombré sans qu’il soit besoin de l’enrichir de nouveaux cadavres».



Il y a peu, en 2012, s’agissant des crimes colonialistes commis le 17 octobre 1961 sous la direction d’un préfet (Papon), un ancien Premier ministre, François Fillon, déclarait en avoir assez « que tous les quinze jours, la France se découvre une nouvelle responsabilité, mette en avant sa culpabilité permanente. J’ai déjà été choqué des déclarations de la France responsable des crimes commis pendant l’Occupation sur son territoire… ». Et ajoutait : « … que cesse ce rituel infantile consistant à s’indigner tous les six mois parce qu’un scoop révèle que des Français ont collaboré, ou que Vichy fut complice de la “Solution finale” ».



Ce propos de François Fillon rappelle opportunément que le tabou levé par Jacques Chirac était pour certains un accident regrettable. Ces derniers nous somment d’oublier les méfaits et crimes d’État, qu’ils concernent le colonialisme ou Vichy. Oublier l’abandon à la mort des fous internés dans les hôpitaux psychiatriques pendant la Seconde Guerre mondiale ? Non, la cohésion nationale d’un peuple ne passe pas par l’idéologie de l’oubli. Il ne s’agit pas de jeter de l’huile sur le feu, mais la cohésion nationale passe par la reconnaissance des responsabilités des uns et des autres : collaborateurs et résistants, colonialistes et anticolonialistes…



Oublier ? Ainsi s’expliquent silences, censures… et crise de la presse écrite nationale !

 

 

 

Transmis par Armand Ajzenberg

 

http://lesanalyseurs.over-blog.org

 

http://journalcommun.overblog.com/ 

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