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  • : Analyse institutionnelle : Théorie et pratique au sein des institutions politiques, éducatives et de recherche. L'implication des individus et des groupes dans la vie politique et sociale.
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23 septembre 2013 1 23 /09 /septembre /2013 14:40

 

CHRONIQUE POLITIQUEMENT INCORRECTE No 13



NÉS SOUS X



Dans les chroniques précédentes, on a pu voir que dans ceux que nous nommons aujourd’hui « les élites » il y avait autant de « collaborateurs » avec Vichy ou l’occupant que de « résistants », et autant attendant des jours meilleurs. En gros 1/3 dans chaque catégorie.



On a pu voir encore que certaines « élites », et bien plus que je ne le pensais, avaient en même temps un pied dans la « résistance » et l’autre dans la « collaboration», sans que cela ne constitue pour autant une couverture. Cela faisait partie d’une ambivalence existant alors et que certains historiens ont mis en évidence.


Aujourd’hui, près de 70 ans après les faits et méfaits d’un régime, l’appréciation des responsabilités de Vichy par les « élites » est toujours en débat. Si Jacques Chirac a mis fin aux polémiques concernant la complicité de Vichy dans l’envoi des juifs vers les camps de la mort, il n’en va pas de même s’agissant de l’abandon des fous à la mort par le même régime. «Après tout, la plupart des Français ont du mal à admettre la responsabilité nationale en la matière » m’écrivait Rita Thalmann peu avant sa mort. Cela est significatif et révélateur de l’ambivalence toujours existante quant à l’analyse du régime de Vichy.



Elle est morte en août dernier et il est significatif et révélateur que même un journal comme « Le patriote résistant », dans l’article nécrologique la concernant parle de son père mort à Auschwitz et oublie de dire que sa mère est morte dans un hôpital psychiatrique à Dijon pour les mêmes raisons idéologiques : « la volonté du gouvernement de Vichy de se débarrasser des “fardeaux inutiles” » écrivait-elle.
http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/220813/en-memoire-de-rita-thalmann

On a pu voir enfin, après la Seconde Guerre mondiale, un mur du silence s’établir concernant les «élites» ayant d’une manière ou d’une autre collaborés, et mur du silence être jusque là généralement respecté dans chacune des corporations où celles-ci avaient opérés.



On a déjà pu soupçonner qu’après la guerre ces «élites» collaborationnistes avaient repris leur activités comme si de rien n’était. Soupçons fondés. C’est Laurent Olivier dans « Nos ancêtres les germains » qui en rend compte de manière explicite : « Comme en Allemagne, où la plupart des archéologues employés au service du IIIe Reich poursuivirent leur carrière après guerre, aucun des chercheurs qui avaient été recrutés par le régime de Vichy pour administrer l’archéologie française ne fut démis après 1945. […] Comme leurs homologues allemands, ils continuèrent à former des étudiants jusque dans les années 1970 et 1980. Le cas de l’anthropologue Henri Vallois (1889-1981) est exemplaire de cette continuité. En 1941, il avait été nommé professeur au muséum d’Histoire naturelle, pour y diriger le Laboratoire d’ethnologie des hommes actuels et fossiles, en remplacement de Paul Rivet. Rivet, qui avait soutenu dès l’été 1940 la création du réseau de résistance du musée de l’Homme, avait été révoqué en effet par le régime de Vichy. Lorsqu’en 1945, Rivet retrouvera son poste à la tête du musée de l’Homme, Vallois devra lui céder la place. Ce sera pourtant le même Vallois qui, en 1950, succédera à Rivet à la direction du musée, lorsque celui-ci prendra sa retraite. Il dirigera le musée de l’Homme jusqu’en 1960 ».

Pour Laurent Olivier, les transformations développées par l’archéologie du IIIe Reich ont laissé un héritage qui non seulement après la guerre s’est transmis à toute l’Europe, « mais a constitué surtout le socle de l’organisation et du fonctionnement de l’archéologie dans les différents pays d’Europe occidentale. À bien des égards, l’archéologie d’aujourd’hui est l’héritière de l’archéologie nazie » écrit-il. En France, elle est en plus l’héritière de la politique élaborée en la matière par le régime de Vichy. Cette spécialité est un exemple entre autres de la continuité des politiques élaborées sous Pétain et reprisent ensuite à la Libération dans nombres d’institutions.

Jean Ferrette, dans son étude consacrée aux sociologues sous Vichy (« Anamnese » No 7, 2012) et posant la question : « Vichy, rupture ou continuité ? Retour sur un impensé historique » répond ainsi : « La question de la “rupture” disciplinaire (ou du «changement de paradigme ») avec la recherche passée est, dans le cadre d’une occupation étrangère, double : elle s’ouvre avec le début de celle-ci, et se redouble à la fin. Ainsi, Vichy a pu rompre avec le Front populaire, puis la Libération rompre avec Vichy. On sait désormais que les choses ne se sont pas tout à fait passées ainsi. De même, la continuité peut être celle de Vichy, au sens où Vichy a poursuivi des projets élaborés auparavant ; mais elle peut être aussi celle de la reconstruction, qui a pu continuer des enquêtes conçues sous l’Occupation.


“Le sens” que l’on peut attribuer “a posteriori” s’en trouve considérablement affecté, et peut donner lieu à des interprétations contradictoires : si Vichy poursuit des travaux conçus auparavant, il se trouve exonéré de la responsabilité des thèmes de recherches mis en œuvre; ou, à l’inverse, c’est le Front populaire qui se trouve compromis par ces choix. Si, sur l’autre versant, la Reconstruction prolonge les enquêtes décidées sous Vichy il peut en découler deux interprétations contradictoires ; soit Vichy s’en trouve anobli (puisqu’elles furent reprises par la France gaulliste), soit que la période qui suivit fut contaminée et que l’épuration ne fut pas menée jusqu’au bout.


En définitive, quel que soit le point de vue selon lequel on aborde cette période, le soupçon n’est jamais loin, et l’accusation aux aguets.

 
Or dans les faits, tous ces mouvements de reprise eurent effectivement lieu, ce qui n’empêchait pas, à l’intérieur de ceux-ci, des moments, des lieux de rupture par accentuation, abandon ou réinterprétation ».



Ainsi, les institutions conçues sous Vichy (archéologie, sociologie et bien d’autres) étaient-elles nées sous X. L’institution psychiatrique, elle, fut l’une des rares (la seule peut-être) née non de Vichy mais de la Résistance? Cela explique-il la haine développée à propos de ceux qui ont rompu le silence et leur volonté de refermer le couvercle de la marmite sur ce fait : une psychiatrie nouvelle, novatrice, inventée pendant la guerre… contre Vichy ? Il faudra bien sûr y revenir.

 


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Transmis par Armand Ajzenberg

 

 

 

http://lesanalyseurs.over-blog.org

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