Je commence tôt ce matin par m’interroger sur ce que j’ai retenu de la lecture de la veille.
J’ai souligné quelques passages que je reprends ici : « Qu’est ce que la beauté sinon l’image où nous trouvons reflétée la joie extraordinaire qu’éprouve la nature quand une possibilité (c’est moi B qui souligne) de vie, nouvelle et féconde, vient d’être découverte ? Et qu’est ce que la laideur, sinon le dépit contre soi-même, quand on doute que l’art soit encore capable de nous séduire en faveur de la vie ? » p.28
Je suis attiré par les définitions, non pas par celles des dictionnaires et ce malgré leur utilité, mais par celles des philosophes. L’auteur donne une définition de la beauté et de la laideur, non pas en vue d’expliquer ce que ces mots veulent signifier, mais la définition intervient dans l’élan du discours, dans son flux ; c’est un passage vers quelque chose, afin d’atteindre un but lointain et proche à la fois. C’est la vie et la civilisation grecques qui intéressent l’auteur, lequel cherche à expliquer pourquoi la philosophie est grecque, présocratique et non pas autre chose.
Je souligne encore : « Chaque fois qu’un homme s’est trouvé tenté de se retirer à l’écart et de refermer autour de lui une barrière d’isolement égoïste, la philosophie a été prête à aggraver son isolement et à le détruire par cet isolement. Elle est dangereuse dès qu’elle ne jouit plus de la plénitude de ses droits, et seule une parfaite santé nationale lui assure ces droits – encore n’est-ce pas vrai de tous les peuples». p.26. Je me demande pourquoi je reprends ce passage ? Probablement parce qu’il me parle. En effet j’ai remarqué que mes lectures philosophiques surviennent à des moments où je décide de m’isoler, de ne pas trop me déplacer et d’éviter certaines activités dites de distraction, en d’autres termes, d’être en compagnie des autres. Pourtant, Nietzsche a l’air de dire que c’est le contraire qu’il faut pour le philosophe et la philosophie. En le suivant, j’en déduis que je ne suis pas philosophe et que ce que je fais n’est pas de la philosophie. Qu’est-ce que je suis en train de faire donc ? Je lis des livres de philosophie. Pourquoi ? Pour l’instant, je n’ai pas de réponse à cette question.
Nietzsche écrit plus loin que ces philosophes sont des inventeurs. « En effet, ils ont inventé les principaux types de l’esprit philosophique auxquels la postérité toute entière n’a rien ajouté d’essentiel » p.28
Après des considérations générales sur la philosophie grecque du V et VI siècle, l’auteur propose d’étudier ces philosophes un par un. Il commence par Thalès. Auparavant, il conclut ces considérations en disant « (…) ayez d’abord une civilisation, puis vous apprendrez ce que veut la philosophie et ce qu’elle peut » p.34.
Pour résumer l’idée principale qui fait de Thalès le premier philosophe, l’auteur nous apprend que le principe « Tout est un » que l’on retrouve chez tous les autres mystiques, constitue le point de départ philosophique. « Le mot grec qui désigne le sage est lié étymologiquement à sapio, je goûte, sapiens, le dégustateur, sisyphos, l’homme au goût extrêmement subtil. Une faculté aigue de goûter et de connaître les choses, une aptitude remarquable au discernement constitue donc, dans l’esprit du peuple, l’art propre au philosophe » p.38.
Pour distinguer la philosophie des autres modes de pensée, l’auteur explique : « La science se précipite sans choix, sans délicatesse, sur tout ce qui est connaissable, avec le besoin aveugle de tout connaître à tout prix ; la pensée philosophique au contraire est toujours sur la piste de ce qui mérite d’être su, des connaissances grandes et essentielles». p.38.
Pour revenir à la pensée de Thalès, Nietzsche la résume dans : « L’eau est le principe de toute chose ». Plus loin, il reprend sa définition du philosophe : « Le philosophe cherche à faire résonner en lui la symphonie universelle et à la projeter hors de lui en concepts. Contemplatif comme l’artiste, compatissant comme l’homme religieux, curieux des fins et des causes comme le savant, tout en se dilatant aux mesures du macrocosme, il conserve assez de présence d’esprit pour se considérer froidement comme le reflet de l’univers ». p 39.
Benyounès Bellagnech
http://lesanalyseurs.over-blog.org/